vendredi 8 août 2008

Le grand silence (Die grosse stille)


Jamais auparavant un cinéaste n’avait eu le privilège de pouvoir filmer la vie dans cette maison mère de l'ordre de Cartusien dans les Alpes français. Même les dernières photographies datent d’il y a 60 ans. D’autant plus grand donc est le mérite de Philip Gröning d’être parvenu à réaliser un tel exploit, pour lequel il n’a pas hésité à vivre six mois en tant que moine pour s’imprégner de l’ambiance des lieux.

Gröning illustre le quotidien de ces religieux, leur système d’autosuffisance, La Grande Chartreuse s’articulant comme un univers cohérent où chacun à sa propre fonction (jardinier, coiffeur, cordonnier, etc.). Certaines scènes sont à titre surréalistes, comme celle où une bnde de moines s’en va faire de la luge dans la montagne. Une manière symbolique et originale de montrer qu’en fin de compte, ces hommes sont comme tant d’autres…

Mais plus que cela, c’est la foi inébranlable de ces hommes que le cinéaste met en avant, comme lors de cette conversation avec un moine aveugle qui rend grâce à Dieu de cette cécité. Là, nous sommes en droit de nous demander si ce à quoi nous assistons est un simple documentaire inédit, ou une prise de position (pour ou contre, à l’appréciation du spectateur) d’un certain « fanatisme » si on peut dire de la part de ces hommes.

La réalisation de Gröning, d’une sobriété constante, a le mérite d’étendre le film sur 2h40 sans que cela se ressente. Il est étonnant de voir qu’à l’instar de ce monastère, le temps ne semble pas avoir d’emprise sur le film, ce qui permet au spectateur d’appréhender calmement et sûrement ce qu’on lui donne à voir. La capacité du cinéaste à étendre son film sur une durée aussi longue avec des scènes somme toute banales tient presque du… miracle. Il en résulte cependant que nous sommes comme hypnotisés par ce film qui s’installe au plus profond de nous. Kubrick souhaitait obtenir un tel résultat, Gröning y parvient ici. Et bien que le film se ressemble par moments, sans doute un effet de style de la part du cinéaste qui se joue de nos repères temporels, le film défile presque comme un ensemble de morceaux de vie distincts les uns des autres, et formant pourtant un tout cohérent.

Il reste juste un détail troublant : la composition des plans de Gröning. A les voir, on se dit que ce type est un cinéaste né, pro du cadrage et dont chaque élément inscrit dans le cadre semble avoir été pensé, tout comme le jeu des lumières et des couleurs. On en viendrait presque à se demander si le documentaire n’a pas été répété juste avant…

Un documentaire fascinant, surprenant et qui laisse une forte impression derrière lui, comme si l’on savait d’office que plus jamais on ne verrait tel documentaire. Ce qui ne doit pas être totalement faux quelque part…

Note : ***

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