mercredi 15 août 2007

Le fils


Les frères Dardenne, c’est bien connu, c’est pas le cinéma le plus drôle qui soit. Et pourtant ils peuvent encore faire mieux apparemment, comme le prouve Le Fils.

On le connaît le dada des frangins : le social. Mais attention, le vrai, le pur, celui qui fait mal dans son amour-propre de gens aisé ! La promesse, Rosetta, L’enfant, autant de films qui mettent en avant des gens un peu différents car moins bien lotis que nous. Avec Le Fils pourtant, les frères délaissent un peu la misère urbaine pour s’attarder sur l’humain. Et, une fois n’est pas coutume, s’ils ont l’habitude de prendre énormément de distance avec leurs récits, c’est en ajoutant celle avec ses personnages qu’ils ont réalisé ce film.

Le fils en question, c’est celui qu’à perdu Olivier, et qu’il tente malgré lui de retrouver à travers celui qui a justement tué son enfant, un autre ado dont il a la charge à l’atelier menuiserie. Geste inconsidéré, fou, incompréhensible pour nous comme pour les autres protagonistes, Olivier le premier. C’est sans doute là l’élément le plus fascinant du film, cette relation impossible entre un tueur et le père de sa victime, tourmenté et avec une sérieuse tendance à s’autoflageller sans comprendre pourquoi.

Pour filmer ça, les Dardenne ont une manière bien à eux : « Un malaise tel entoure cette histoire qu'on ne pouvait pas la regarder de face mais avec une caméra placée derrière les corps ou de biais. On cache le visage d'Olivier au début du film, et le jeune homme n'est montré qu'après les 20 premières minutes. Ce qui était dérobé nous apparaissait aussi important que les choses révélées. La nuque tenait lieu de regard. » Idée très intéressante bien qu’un peu mal exploitée, la frustration du spectateur de ne pouvoir s’identifier aux personnages étant accentuée par la mise à l’écart de l’action du film.

Metteurs en scène doués et exigeants (ils ont auditionné 180 garçons pour trouver le bon, tout comme ils refont fréquemment une vingtaine de prises par scène), les frères ont hélas tendance à être trop hermétiques, trop froid pour vraiment nous permettre de les apprécier à leur juste valeur ; soyons honnêtes, comment aimer un film qui nous fout le moral dans les godasses ? Difficile pour ne pas dire impossible lorsque l’on est sincère envers soi-même.

Ils restent néanmoins des directeurs d’acteurs fabuleux : en plus d’avoir révélé un talent (Morgan Marinne) ils en ont confirmé un autre en lui permettant de décrocher le Prix d’interprétation à Cannes : Olivier Gourmet, à vif, en équilibre entre les deux émotions que sont la haine et la tristesse. Assurément l’un de ses rôles les plus marquants.

En définitive, les Dardenne manipulent mal leur récit pour être des cinéastes populaires, car le talent ils l’ont ; reste à quitter un peu le désespoir et laisser paraître plus de joie, histoire de rappeler que c’est aussi du cinéma tout ça…

Note : **

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