lundi 30 janvier 2012

Entre les murs

Dangereux : tel est le qualificatif que je donnerais volontiers à Entre les murs. Que le festival de Cannes et les Césars se soient fourvoyés en récompensant ce film ne me semble pas tant problématique au niveau esthétique qu'au niveau thématique.

Je reprends : ce pauvre François Bégaudeau, prof sexuellement ambigu (je ne vois pas l'intérêt de cette info dans le film d'ailleurs) mais sympa avec les élèves enseigne le français à une classe... d'étrangers. Noirs, arabes, asiatiques : pas un seul blanc ou plutôt si, un isolé, un gothique (original…) conspué par ses camarades pour son apparence. Et puis voilà qu'un jeune black parle de football, et souhaite que le Mali l'emporte, l'autre lui veut tel pays ; un troisième noir se plaint, agacé, que le vrai pays de cette classe est la France, et le ton monte, les jeunes difficiles refusant de se reconnaître Français. La scène en reste là, pas de débat sur l’identité nationale, pas de réflexion sur des jeunes qui ont peut-être du mal à se reconnaître, pour une raison ou l’autre, chez eux mais bien comme des immigrés involontaires. Deux exemples, parmi d'autres, qui dégagent une vision nauséabonde des jeunes de banlieue, génération perdue mais refusant de se retrouver en s'opposant à l'enseignement, à la tolérance et au respect de l'autorité. Il ne s’agit pas ici de justifier les actes de ces élèves d’une quelconque manière, et fort heureusement il y a parmi eux quelques étudiants cherchant à développer leur personnalité, à approfondir leurs connaissances, mais c’est amener avec la grâce d’un éléphant dans un magasin de porcelaine (la meneuse de groupe rebelle qui le soir lit Platon…

Je n’accuse pas Cantet du degré de lecture que je propose ici ; le réalisateur n’épargne pas nécessairement le monde professoral, via cette scène où les professeurs expédient un peu les sujets concernant les élèves pour s’attarder sur un problème fondamental : la machine à café devenue plus chère. Où encore ce débat entre deux professeurs, l’un accusant l’autre de vouloir acheter la paix sociale en excusant un élève de son mauvais comportement et de ses mauvaises notes sous prétexte qu’il possède de réelles qualités malgré tout. Mais tout cela ne représente, grosso modo, qu’une poignée de minutes sur un film de 2h10.

En temps normal, je me serais amusé à démolir le film, à jouer les cyniques, mais aucune envie ici : techniquement il n'y a rien de franchement raté, au contraire c'est plutôt bien fait, et la teneur du discours (voulu ou non, il est bien compréhensible dans ce sens-là) font que je préfère oublier ce film qu'on a trop vite associé à un regard juste sur une jeunesse en difficulté ; il est plutôt le reflet d'une crainte de la génération précédente sur la nouvelle.

Note : *

vendredi 27 janvier 2012

Panic à Florida Beach (Matinee)

Ceci est un texte hommage envers un blog défunt ; voir à la fin du texte.


Connaissez-vous Joe Dante ? Evidemment, ce n’était qu’une formule rhétorique. Le papa des Gremlins et des Small Soldiers n’est définitivement plus à présenter, en particulier sur ce blog. Mais connaissez-vous Panic sur Florida Beach ? Ouais, je me disais aussi…

Le film raconte comment une bande de morveux fans de films d’horreur décident d’aller voir le dernier film de Lawrence Woolsey, le pape de la série B. Tout cela prend place dans un contexte bien précis : en pleine crise de Cuba, quand ce brave Fidel Castro menaçait de chatouiller à coup de bombes atomiques les côtes américaines.

Joe Dante… Le roi de la subversion, l’empereur de l’ironie, le génie du cynisme. Eh ben que dalle : Panic sur Florida Beach est un teen-movie gentillet et prévisible, pas très bien interprété de surcroît, hormis par un John Goodman en mix improbable entre Hitchcock, Val Lewton et Orson Welles. C’est d’autant plus dommage que le film à l’intérieur du film, Mant !, lui, fleure bon le délire rendant hommage aux séries B et Z, celles de Jack Arnold surtout. On est bien loin de Dr Folamour quant au contexte, et de Tim Burton (Ed Wood et Mars Attacks !) pour le clin d’œil appuyé. Sauvons toutefois une séance de cinéma comme on aimerait en vivre, qui n’est pas sans rappeler pour ceux qui l’ont connu l’attraction Chérie j’ai rétréci le public à Disneyland Paris, où l’interaction entre le film et le spectateur se fait à grand coup d’effets machiniques. Un hommage sincère, sans doute, mais un peu faible, surtout quand on connaît le talent de Joe Dante pour transcender un film de ce genre.

En bref, j’ai un peu l’impression que Joe Dante passe à côté de son sujet, sans doute plus par crainte économique que par volonté artistique : à vouloir plaire au plus grand nombre, le cinéaste se fourvoie dans quelques clichés dispensables, même si on a vu bien pire en la matière. Ce n’est pas un mauvais film, soyons clairs, mais un peu plus de subversion, comme justement Small Soldiers ou les Gremlins, n’aurait pas fait de mal, d’autant que tout le talent de Dante est visible dans le film au sein du film, Mant !. Un film un peu frustrant, vu son potentiel, mais qui se laisse néanmoins regarder si l’on n’est pas trop exigeant.

Note : **




Vous pouvez retrouver cet article, et une centaine d’autres bien plus passionnants, sur le blog de Sam http://thegreatmoviepictureshow.over-blog.com, qui vient malheureusement de fermer ses portes faute de visites… C’est un excellent blog, mais fort heureusement son tout aussi excellent rédacteur migre vers d’autres horizons qui s’annoncent fort sympathiques eux aussi. Rendez-vous sur son blog pour en savoir plus ! See you, Bloody Sam.