mardi 14 août 2007

La Chute (Der Untergang)


Le cinéma est autant un outil d’expression artistique qu’une manière de rappeler l’Histoire comme on ne le fait pas souvent dans les manuels. A condition de manipuler ses informations avec prudence, ce qui n’est pas vraiment le cas dans La chute.

D’entrée de jeu, le film nourrit la polémique : comment peut-on représenter les dernières heures de vie de l’un des plus grands tyrans de tous les temps ? En soi, ce n’est pas ça l’important, certains y sont parvenus avec brio dans des films ou téléfilms. Non, la vraie question est : quelle position faut-il rendre lorsque l’on fait un film de ce genre ? Cette question, le réalisateur Oliver Hirschbiegel et le scénariste Bernd Eichinger ne parviennent pas à y répondre en construisant un film authentique mais dépourvu d’âme. Selon le réalisateur, le danger résidait bien plus dans le fait de conserver de lui l'image irréelle d'un monstre qu'à le restituer dans ses traits d'homme: « C'est une insulte aux victimes de prétendre qu'il n'était pas un être humain (...) Il a su exactement ce qu'il faisait à chaque moment de sa vie, et, avec lui, tous ceux qui le suivaient (...) Si vous le trouvez sympathique, c'est que vous n'écoutez pas ». Pour le scénariste, « le plus grand danger consistait à faire d'Hitler un psychopathe ou un fou. Hitler était animé d'une énergie criminelle et destructrice incommensurable -c'était un barbare au sens le plus fort du terme. Mais je suis convaincu qu'il est resté maître de lui jusqu'à la fin -et c'est pour cela que le pouvoir ne lui a jamais échappé ». Des intentions louables sans doute, des justifications honnêtes, mais hélas le film l’est beaucoup moins : en refusant de prendre parti, en montrant tour à tour un Hitler bourreau et victime, La chute met très mal à l’aise. Pour Bruno Ganz, le est pourtant sans ambiguité, comme il le précise : « [Le film] porte un regard très dur sur la chute du régime. Un regard sans pitié. Et même si certaines situations peuvent donner le sentiment d'humaniser les personnages, et si Hitler n'est pas décrit du début à la fin comme un bourreau, l'idéologie véhiculée par les protagonistes est montrée comme totalement absurde et démente (...) ». Nous sommes déjà plus proche de la vérité, mai la zone d’ombre reste quand même bien présente et gâche l’ensemble du film pourtant correct.

La réalisation d’Hirschbiegel, en dépit de ce problème de clarté, souffre aussi d’une légère transparence par moment, mais qui est vite effacé par un aspect plus documentaire que fictionnel, minimisant els effets pour privilégier le drame intimiste. Les quelques combats que nous voyions n’ont rien de glorieux et ne sont même pas dignes d’un film de guerre, mais c’est l’effet voulu : de la sorte, nous pouvons mieux nous concentrer sur les personnages et leurs situations plutôt que sur l’invasion des Russes dans Berlin. La reconstitution de la ville allemande en 1945 est remarquable, tout comme l’ambiance de l’époque est parfaitement rendue, surtou la tension de la fin du Régime nazi.

Du côté des acteurs et actrices, en revanche, aucun problème même de justesse : chacun est à sa place, fidèle à la personnalité de celui qui l’interprète, en particulier Goebbels et Eva Braun, mais c’est bien évidemment l’incroyable Bruno Ganz qui domine tout, rendant humain le monstre qu’il incarne tout en conservant la folie qui l’habitait intacte, comme lors de ces réunions ou dernières nouvelles qui le mettent dans une colère noire.

Un film qui pêche donc par sa longueur, sa mise en scène assez plate et surtout un effet de balancier qui nous fait osciller entre l’admiration d’avoir choisi un tel sujet et la honte de voir que les auteurs ne désirent pas se mouiller de trop dans un récit qui, visiblement, les a dépassé. Je ne sais pas si en d’autres mains le film aurait été mieux, mais le doute est permis.

Note : **

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