dimanche 3 juin 2007

Le Prestige (The Prestige)


Christopher Nolan fait partie de cette nouvelle génération qui permet de croire encore à un cinéma de qualité. Même dans le système hollywoodien, il parvient à s’imposer sans perdre ses qualités d’auteur, comme le prouve ce Prestige.

Chaque tour de magie se compose en trois actes. Le premier acte "la promesse" présente au public une situation banale ; le deuxième acte "le revirement" la situation de départ devient extraordinaire ; enfin le dernier acte "le prestige" présente l'aspect le plus spectaculaire du tour. C’est au cours de cet acte qu’on lieu rebondissements et coups de théâtre, où des vies sont en jeu et où se produit un événement spectaculaire qui vous clouera sur place.

Grâce à Nolan, nous pénétrons dans un univers où le mystère est la règle d’or. Le temps du film, le cinéaste lève le voile sur un monde qui est, qui doit rester secret, sans pour autant en faire disparaître la… magie. Subtilement, il nous présente ses tours, puis les explique sans jamais interférer au bon déroulement de l’intrigue. La mise en scène de Nolan s’adapte à l’histoire qu’elle raconte en privilégiant le mystère au réalisme, bien que la reconstitution historique soit hallucinante. Mais le point fort reste le duel des deux hommes. Cette confrontation psychologique et magique entre les deux héros, aux confins de la folie, permet au film de tenir la distance sur un peu plus de deux heures. Deux personnages aussi différents que complémentaires (l’un est doué pour le spectacle, l’autre pour la magie).

Nolan s’offre également un casting prestigieux (ha ha ha) dominé par Hugh Jackman et Christian Bale. Si le premier en dandy de la magie ne manque pas de classe et d’humour, le côté sombre et trouble de Bale, utilisé à la perfection par Nolan, permet d’équilibrer les interprétations. Les seconds rôles ne sont pas en reste, du vétéran Michael Caine toujours aussi brillant avec son flegme so british, et un David Bowie en savant mystérieux qui dévoile une autre facette de son talent d’acteur. Les personnages féminins apparaissent dès lors un peu en retrait, même la sublime Scarlett Johansson bien qu’elles soient toutes au diapason, promptes à tenir la dragée haute aux hommes – en vain.

Comme pour Memento, Nolan retrouve son frère Jonathan pour écrire le scénario et, à nouveau, opte pour une narration éclatée. Un petit changement cependant : il n’y a plus un mais deux narrateurs, chacun lisant les carnets de l’autre. Une structure qui peut déstabiliser mais qui, comme en magie, attire notre attention sur autre chose que le fait principal : un scénario moyen. Il y a en effet quelques longueurs qu’il faut masquer et surtout un final beaucoup trop prévisible, à tel point qu’il est décevant. C’est là le bémol principal du film, une maîtrise de son histoire jusqu’au dernier quart d’heure qui non seulement déçoit mais s’avère être interminable, coupant l’élan du récit qui nous avait captivé jusque là. Comme lors d’un tour, on regrette l’explication qui fait perdre le côté fantastique de la chose.

Une petite faute certes, mais qui empêche Le Prestige d’atteindre les sommets. En soi, ce n’est pas bien grave : la magie du cinéma est restée intacte, et d’un point de vue formel le film est probablement le plus abouti de son auteur. Attendons un scénario béton pour crier au génie, ce qu’est assurément le cinéaste britannique.

Note : ***

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