mardi 22 décembre 2009

Avatar


James Cameron ceci, Avatar cela, 11 ans d’attente, révolution de la 3D, bla bla. 300 millions de dollars, c’est sûr, faut les rentabiliser, alors on fait un buzz de dingue.

Premier constat : visuellement, c’est la grosse claque. Je veux pas stresser George Lucas, mais Weta (déjà à l’œuvre sur Le seigneur des anneaux) sont en train de les écraser à coup de bottes pointure 53. C’est propre, net, parfaitement calculé, fluide, bref ils deviennent presque transparents tant ils sont réussis, ce sont des effets spéciaux de dingue. Je ne crois pas qu’on reverra une planète sauvage aussi aboutie avant quelques années. Le bestiaire, en plus de son côté impressionnant, est savoureux de « réalisme ».

Mais pour le reste ? Je vais suivre le mouvement des mécontents et dire la fameuse phrase : « tout ça pour ça ». 300 millions de dollars : on aurait pu en consacrer au moins un petit à l’écriture d’un vrai scénario. Ici, c’est Pocahontas chez les Schtroumpfs irakiens : l’étranger ténébreux qui va tomber amoureux de la princesse des sauvages et découvrir la beauté de la Nature, alors que les vilains pas beaux GI Joe veulent leur péter la gueule à coup de bulldozer et de bombes pour piquer les ressources naturelles des dits sauvages à des fins purement économiques. C’est du Disney en plein : les gentils vraiment gentils contre les méchants vraiment méchants (avec même la traditionnelle mort d’un parent de l’héroïne, comme Disney aime en faire). Logique : 300 millions, faut attirer toute la famille, et la seule recette efficace à ce jour c’est Disney alors autant les copier. Ah oui, autre détail significatif : tant qu’à faire, Cameron surfe sur la vague écolo (non mais respectez la nature, svp, bande de brutes, ou elle va s’énerver !) et sert de la réflexion à deux balles sur 2h40.

Déjà ça, c’est agaçant. Mais alors perdre ce qui fait la saveur d’un Cameron au passage fait mal, là non ! Et ça filme l’initiation du héros (vachement longue d’ailleurs), et ça filme la jolie nature (virtuelle mais bon), et ça filme l’Amour naissant. Mais côté action, que dalle ! Cette fameuse bataille dantesque qui devait être un film à elle toute seule dure à peine 15 minutes et on a déjà vu bien mieux. Il y a bien des moments de ci de là mais quand ce n’est pas surchargé d’effets spéciaux, ce qui donne un côté cinématique de jeu vidéo plutôt qu’autre chose, c’est assez basique, surtout venant de la part du réalisateur de Terminator, Aliens ou True Lies. Cameron s’efface donc, perd ce qui faisait sa personnalité (le subtil mélange d’action et de réflexion, l’importance de la Femme…) et tend vers des généralités.

Et tant qu’à faire, concluons en beauté : la 3D. S’il appelle ça une révolution, j’appellerai ça une arnaque. Oh oui, les effets spéciaux sont bien mis en valeur ça c’est sûr. Mais le reste ?? Aucune accroche du spectateur (alors que certains plans auraient pu être juste énormes) et, pire, une fâcheuse tendance à n’utiliser la 3D parce que c’est fashion, sans recherche esthétique (la profondeur de champ) ou attractive (des effets pour scotcher). Moi-même critique envers certains effets faciles de la 3D (comme les utilisent les films d’horreur en ce moment), je me rend compte que c’est bien là le seul intérêt à ce jour de ce procédé qui n’a rien de révolutionnaire rappelons-le (c’est exaspérant d’entendre dire que c’est l’avenir du cinéma alors qu’il y a plus de 50 ans que ça existe).

L’argent a donc finalement été le plus fort : c’est bien beau de faire le film le plus cher de tous les temps, mais faut avoir l’audace de ne pas céder à la pression en faisant n’importe quoi pour attirer le public, comme ici servir une histoire pour enfants de 4 ans et aucune violence. Un divertissement moyen sympathique, mais un Cameron décevant. Je retourne voir Terminator 2 tiens.

Note : *** (tendance **)

5 Comments:

eelsoliver said...

Cameron réussit encore un très grand film et tient sa promesse de la révolution annoncée. Un réalisateur à ranger au panthéon des plus grands cinéastes

princécranoir said...

J'entends bien les reproches concernant l'absence prétendue de scénario (bien plus réfléchi et subtil qu'il n'y paraît, il ne faut pas confondre synopsis et scénario), la morale et la fin consensuelle (principal grief que je retiens également). J'ajouterai une esthétique surchargée et une post-production (la musique en particulier) d'un goût de shamallow. Mais s'en prendre aux fondements de l'histoire. On a tous évidemment en tête l'affaire Pocahontas, en ce qui me concerne davantage celle revue par Terrence Malick que par les studios Disney. J'y ajoute une authentique réflexion sur la position du spectateur dans le spectacle (le parallèle possible entre le héros en fauteuil roulant propulsé dans son avatar et le spectateur sur son siège propulsé dans le film). Nous sommes en effet ici bien loin des simple effets de manche de la 3D au cinéma (de "Wax Museum" à "My Bloody Valentine" en passant par "Dial M for Murder") mais plus proche d'une mise en abyme façon "Coraline". Regretter l'absence de profondeur de champ dans ce film alors qu'on compte jusqu'à sept niveaux de relief dans certaines scènes de jungle, c'est avoir un peu survolé le film.

Bastien said...

A Princécranoir :

Deux éléments me font penser plutôt à Disney : Pocahontas oui mais la version de Malick se termine tragiquement, or Avatar c'est le happy end dégoulinant de sentiments qui arrive. Ensuite, chose curieuse et drôle, le film se cloture par ce très gros plan des yeux du personnage et, de suite après, le titre "AVATAR" qui arrive comme dessiné, effet typique des fins de Disney.

Quant à la profondeur de champ dans la jungle, John McTiernan l'avait tout aussi bien réussie (avec moins de moyens et d'effets spéciaux) dans Predator il y a plus de 20 ans déjà...

Et plus j'y repense, plus j'ai vu un jeu vidéo plutôt qu'un film. Je veux bien que Cameron veuille révolutionner le cinéma via la technologie, c'est tout à son honneur et il le réussit quelques fois mais ce ne sont pas des révolutions, juste des améliorations. Sa prétention devient mal placée avec le temps je trouve : en son temps, Titanic était beaucoup plus audacieux (et abouti) que cet Avatar multiplateformes (dans le sens où c'est un film qui passera aussi bien au cinéma que sur les futures tv HD 3D ou les jeux vidéos). Et ça me fait bien mal car je vénère Cameron, dans mon top 20 des cinéastes de tous les temps.

Wilyrah said...

Tiens, c'est un des premiers avis mitigés que je lis.

ideyvonne said...

Ben voilà! Finalement j'ai réussi à le voir et je ne sais toujours pas trop quoi en penser de ce film si attendu...
D'abord, les décors de la planète sont bien faits, bien pensés et je me demande même si Cameron ne s'est pas inspiré de la flore marine fluorescente qui est autour de la Nouvelle Calédonie. Et ce petit clin d'oeil à la Michael Jackson du clip "beat it" m'a bien fait déliré!
Puis les avatars : pas mal faits mais bon, pas de quoi à casser 3 pattes à un canard non plus! je les trouve un peu trop stéréotypés et dans la lignée qu'on impose aujourd'hui = le culte de la minceur
Et maintenant le GROS HIC : TOUT ce qui est de la technicité des décors du monde réel ressemble beaucoup trop à la saga "aliens". ^(Les caissons, la robotique = transformers, l'intérieur du vaisseau...) Bref, on replonge dans "alien" à 95%
Alors voilà, j'ai aimé et puis j'ai pas aimé. C'est le 1er film qui me partage vraiment en 2 sans pencher pour un oui ou pour un non. Là, Cameron a innové dans ce sens!