vendredi 11 mai 2007

Carrie


Brian de Palma est un cinéaste trop souvent mésestimé alors qu’il pourrait revendiquer le même statut qu’un Coppola ou un Spielberg. Un réalisateur incroyable car très adroit, technicien remarquable qui n’a hélas pas toujours su choisir les bons scénarios mais qui a cependant créer plus d’un film culte, à l’instar de Carrie.

Bien qu’il soit déjà reconnu à l’époque par les critiques (Sisters) et les cinéphiles (Phantom of the Paradise), De Palma ne jouit pas encore du statut de cinéaste bankable, ce fameux statut qui lui permettrait de travailler dans le circuit hollywoodien avec des moyens à la hauteur de ses ambitions. Il lui faut donc un succès populaire, et comme à l’époque les films d’horreur cartonnent autant y aller pour une adaptation d’un roman de Stephen King (à noter qu’il s’agit de la première adaptation d’un roman de cet écrivain). A sa sortie, le film fait fureur : succès public et critique, deux nominations aux Oscars (Sissy Spacek et Piper Laurie) et pour la deuxième année consécutive le Grand Prix au Festival d’Avoriaz. Hollywood n’accueille pas encore le cinéaste avec le tapis rouge, mais il a assurément réservé sa place pour l’avenir.

Comme dit précédemment et plusieurs fois répété chez les cinéphiles, Brian de Palma est un réalisateur virtuose, digne héritier de son modèle absolu Alfred Hitchcock (d’ailleurs le nom du collège "Bates High" est une référence directe à Norman Bates, héros du film Psychose) avec un goût certain pour l’esbroufe ; Carrie est ainsi un petit catalogue du savoir-faire de De Palma, entre profondeur de champ et plans-séquences hallucinants, en passant par le fameux split-screen qu’il affectionne tant. Il s’amuse aussi à faire quelques essais (pour la séquence finale du rêve de Sue, Amy Irving fut filmée en reculant, puis on inversa la pellicule afin de donner une apparence étrange à la scène), bref De Palma s’éclate et du coup nous aussi.

Côté acteurs, c’est la surprise : John Travolta joue son premier rôle au cinéma tandis que Piper Laurie revient après 15 ans d’absence. Pour Sissy Spacek, l’histoire est plus magique : initialement prévue pour le rôle de Chris (tenu par la jolie Nancy Allen), elle doit sa chance à son mari qui insista auprès de De Palma pour qu’elle passe une audition pour le rôle de Carrie. De Palma fut conquis, et ne devait pas s’en plaindre : Spacek était si professionnelle qu’elle garda le faux sang sur elle trois jours pour être identique dans chaque scène, se plaignant même que le sang ne soit pas réel mais soit du sirop et des colorants alimentaires ! Si avec le recul l’actrice n’est pas des plus inoubliables, elle n’en reste pas moins indissociable de ce rôle, par sa timidité et son physique ordinaire.

On regrettera seulement que le scénario soit un peu trop prévisible, d’autant que certaines images hantent pendant longtemps nos esprits (la crucifixion de la mère, le massacre de l’école, la destruction de la maison). De Palma, cinéaste culte par excellence, signait là l’un de ses films si pas des plus réussis au moins des plus populaires, référence pour toute une génération et échauffement à quelques chefs-d’œuvre qui devaient suivre.

Note : ***

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