mardi 8 mai 2007

The Big Lebowski


Dans les frères célèbres du cinéma, il y en a deux qu’on adore citer comme des références incontournables. Non, il ne s’agit pas des Wachowski. Non, encore moins les frères Dardenne : à en choisir deux, on opte pour les Coen, cinéphiles touche-à-tout et pourvu d’un humour bien à eux qui fait souvent mouche comme The Big Lebowski.

A la base se trouve la volonté des frangins de réaliser une pure comédie après Fargo. Ils se disent alors qu’un film dans la veine du Privé de Robert Altman pourrait être sympa. Ethan et Joel se mettent donc à écrire un scénario avec leurs amis Jeff Bridges, John Goodman et Sam Elliott en tête, où l’histoire d’un looser à qui il n’arrive que des noises, devant supporter en plus son ami Walter un peu à la masse. Voilà, vous connaissez maintenant la genèse d’une des comédies les plus abouties de ces dernières années.

Car évidemment le film ne se prend pas au sérieux une seule seconde. Comment faire autrement quand son héros est un chômeur invétéré et fier de l’être ? Les frères Coen voulaient simplement s’éclater, et ils réussissent allègrement à travers notamment un scénario brillamment écrit. Tout d’abord, il y a cette capacité à tourner chaque scène au ridicule, à l’absurde alors qu’en d’autres mains elle aurait pu être traite de manière très sobre. Mais qu’il s’agisse d’une agression du Duc dans son appartement ou d’un échange de valise sur un pont, tout déraille dans la joie et l’allégresse. Le secret tient sans doute dans la construction soignée de chaque personnage : le Duc, baba cool qui aurait mieux collé dans les années hippies que dans les années Bush Senior, auquel le spectateur finit par s’attacher voir s’identifier ; Walter, son meilleur ami, véritable star du film, vétéran du Vietnam avec ce que ça comporte de traumatisme (et hop, le règlement de cmpte avec l’Amérique va-t’en-guerre), qui fait hurler de rire à chaque apparition ; Donny, clin d’œil des frères Coen à Fargo (si ce pauvre Steve Buscemi se voit intimer l’ordre de se taire constamment, c’est parce qu’il ne voulait pas le faire dans Fargo) ; Maude, artiste totalement underground ; le « Big » Lebowski, milliardaire prétentieux et infâme ; autant d’archétypes poussés à leur paroxysme, ce qui en fait des personnages risibles sans arrière-pensée. Même les méchants du film, les nihilistes ou Jacky Treehorn, deviennent drôles. Enfin un élément qui a son importance : le dialogue. Rarement les frères auront atteint un tel niveau dans leurs films, pourtant drôles.

Force est de constater que si le scénario tient largement la route et que les dialogues sont savoureux, il fallait tout de même les interprètes adéquats pour illustrer tout ça. Pas de soucis pour les frangins qui connaissent du monde, et du beau : Jeff Bridges, les récurrents Jeff Goodman, Steve Buscemi, John Turturro et Peter Stormare, Ben Gazzara, Sam Elliott ou encore Julianne Moore et Philip Seymour Hoffman. Il est difficile de se départager entre cette brochette exceptionnelle de talents, mais comme dit précédemment c’est Goodman qui rafle tout sur son passage, hilarant dans son esprit carré et contradictoire, insouciant et proche de la folie. A noter pour la petite anecdote que son personnage est inspiré du scénariste-réalisateur John Milius, autre clin d’œil de cinéphile des frangins. Et pour la peine, on saluera aussi la performance éclair mais totalement jubilatoire de John Turturro en Jesus (pas celui que vous croyez) qui, comme ces grands comédiens dans d’autres films (De Niro dans Brazil, Keitel dans Pulp Fiction) marque le film en l’espace de cinq minutes.

Côté réalisation, Joel Coen sait y faire, sans aucun doute, et il s’amuse ici à jouer avec sa narration : l’histoire étant subjective (nous voyons tout du point de vue du Duc finalement) on a droit à quelques séquences mémorables de rêves étranges, sans oublier cet aspect déconnecté de la réalité qui plane sur tout le film, comme un trip sous acide que Duc aime tant. Aucune prise de tête, et c’est ça le plus rageant, c’est que Joel semble réaliser ce film en toute simplicité alors qu’en réalité, il est très subtil et difficile à rendre, imprimant un rythme effréné à son action sans perdre qui que ce soit en chemin.

The Big Lebowski est donc ce qu’il convient d’appeler un chef-d’œuvre ; ce n’est pas pour rien que Premiere l’a élu numéro 1 des 50 plus grandes comédies de tous les temps. En attendant, allons faire un bowling.

Note : *****

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