jeudi 18 mai 2006

Carnets de voyage (Diarios de motocicleta)


Une belle réussite que ce Carnets de voyage.

Inspiré de leurs journaux intimes, le film raconte le voyage d’Alberto Granado et d’un certain Ernesto Guevara de la Serna, qui sera plus tard connu sous le nom de Che Guevara.

Il faut dire que Walter Salles connaissait bien les livres de souvenirs d'Ernesto Che Guevara : "Ce livre a eu un impact sur moi parce qu'il n'est pas seulement un voyage initiatique mais aussi la recherche de ce que j'appellerais une identité latino-américaine. J'ai retrouvé au fil de mon périple l'essentiel de ce que j'avais ressenti en lisant les témoignages d'Ernesto et Alberto. Ces livres sont modernes et contemporains, signe que les réalités sociales et politiques de la culture latino-américaine ont peu changé en cinquante ans".

En quelques mots, le film est donc résumé : un film humaniste, politique, servi par des décors somptueux.

Politique, le film l’est assurément, établissant le constat affligeant d’une Amérique Latine désabusée, pauvre et ayant perdu toute illusion du bonheur. Si l’Amérique du Sud peine dans le film est sensée représenter celle des années 50, force est de constater qu’en un demi-siècle rien n’a changé.

Humaniste, le film l’est tout autant, décrivant un Che en devenir aimant son prochain, épris de justice sociale, d’égalité humaine (voulant par exemple supprimer le fossé entre les médecins et les lépreux) et refusant le mensonge, quitte à en payer les conséquences.

C’est d’ailleurs la plus agréable surprise du film : Gael Garcia Bernal. Avec toutes les responsabilités que cela comporte (rester proche de la vérité tout en évitant d’égratigner la légende), Bernal offre une dimension exceptionnelle à Ernesto Guevara. Tout en faisant de lui un jeune idéaliste, il dessine le portrait du Che tel qu’il le sera réellement : juste mais sévère, ne concevant la révolution que comme un acte de force. Personnalité trouble, Guevara trouve en Bernal un digne représentant, ce dernier ne tirant même pas la couverture du film à lui seul, jouant parfois même sur les émotions plutôt que les paroles.

Il convient, finalement, de saluer la beauté des décors naturels, des ruines Incas aux Cordillères des Andes. Parfois, le cinéaste cède même au charme de ces beautés naturelles et les filme comme des cartes postales. On ne s’en plaindra pas vu leurs beautés, mais il faudrait voir à ne pas trop se laisser aller…

Un film étonnant, où l’idéologie de la révolution cubaine se dessine en même temps que l’esprit du Che, et où le réalisateur, en plus de rendre un vibrant hommage au mythe du Che, dresse le portrait d’une Amérique Latine occultée, pourtant riche sur le plan humain et d’une beauté visuelle sans nom, qui mériterait à ce que l’on s’occupe un mieux d’elle. Un film à la fois humaniste et politique, c’est trop rarement réussi pour ne pas le saluer.

Note : ***

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