dimanche 28 décembre 2008

New York, New York


Il y a des genres tombés en désuétude dont on ne peut qu’être nostalgique, jusqu’à ce qu’un cinéaste quelconque décide de remettre au goût du jour le dit genre. Scorsese a tenté quelque chose comme ça avec New York, New York.

Après le succès de Taxi Driver, Scorsese était le nouveau chouchou des studios autant que des dealers. En effet, à cette époque notre ami Martin connaît un sérieux penchant pour la drogue et prend bien plus d’une dose par jour. Fantasmant sur le vieil Hollywood et ses comédies musicales scintillantes, Scorsese se prend l’envie de réaliser un « film noir musical », sous influence de Vincente Minnelli (côté réalisation et morceaux musicaux). Il fait alors appel à la fille de celui-ci, Liza, et son désormais fidèle ami Robert de Niro pour tenir les rôles principaux de ce film qui s’annonce colossal. Tandis que Bob apprend à jouer du saxo (même s’il sera doublé par Georgie Auld) et fait remanier la chanson New York, New York (les compositeurs remercieront quelques temps plus tard De Niro de ses précieux conseils), Liza Minnelli est retenue à Las Vegas pour son travail et Scorsese décide de lancer son film sans même avoir un scénario au point. La descente aux enfers peut alors commencer : Scorsese, défoncé à la cocaïne du matin au soir, perd les pédales et voit grand, trop même : les décors coûtent très chers, dépassant le budget, le tournage s’allonge tandis que Scorsese fait patienter près de 150 figurants un beau jour pour s’enfermer dans sa caravane avec son psy. Liza Minnelli, qui entretient une relation avec le cinéaste, n’aide guère les choses en se droguant aussi. Tant bien que mal, le film se termine enfin.

Mais le montage ne s’annonce pas de tout repos : faute d’un scénario solide et par excès de mégalomanie, la première mouture du film dure 4h30, mais les producteurs ne supportent pas cette dernière folie du cinéaste. La coupe est sévère : le film est ramené à 2h33, puis 2h16. Scorsese est alors au plus bas de sa forme, littéralement défoncé du matin au soir et n’ayant plus prise avec la réalité, même quand Robert de Niro lui propose de réaliser un film sur la vie de Jake la Motta… Mais ceci est une autre histoire.

Revenons donc à celle qui nous préoccupe, celle de ce gâchis qu’est New York, New York. Le terme « gâchis » pourra paraître rude, mais il faut bien se rendre à l’évidence : le film possède un potentiel qui aurait mérité un tout autre traitement. Par manque de rigueur, c’est à un film bancal que nous avons droit, ne sachant pas équilibrer le drame de la situation et le comique de Robert de Niro, où une enfilade de scènes peu captivantes pour la plupart ne sont coupées que par des morceaux musicaux trop courts si ce n’est Happy endings, le film dans le film, lui trop long. On n’ose imaginer ce qu’aurait été le même film écrit par Paul Schrader dont les collaborations chaotiques avec Martin Scorsese ont au moins le mérite d’avoir été plus que fructueuses. En dépit, le film ne parvient pas à nous captiver au point de rester du début à la fin, faute à un récit trop elliptique et bancal.

C’est dommage, car on sent dans la mise en scène de Scorsese, décidemment peu habitué aux grosses productions (cfr Gangs of New York par exemple) mais toujours excellent technicien, une volonté de bien faire, de rendre hommage tout en tentant d’imposer sa patte. Une fois sur deux, ça marche. Ce qui est en revanche intéressant de savoir, c’est la part autobiographique du film : un artiste surdoué qui ne parvient pas à vraiment s’imposer, qui refuse d’être père, tout ça c’était Martin Scorsese à cette époque (Robert de Niro aussi devait connaître l’angoisse de la paternité à ce moment-là). Bien plus qu’un conte mélodramatique hollywoodien, c’est son propre vécu, sa propre vie que Scorsese a inséré dans le scénario ; c’est sans doute pourquoi il devait déclarer un jour que c’était un « film de famille à 10 millions de dollars ». Un film de famille stylisé mais dont l’ambition était trop grande.

Et tant pis pour les acteurs, d’une Liza Minnelli convaincante à un sympathique Georgie Auld, mais surtout à un Robert de Niro à l’opposé de son précédent rôle, tour à tour drôle et détestable, qui continuait d’explorer l’Homme dans tout ce qu’il a de plus dangereux et contradictoire. Une performance qui vaut à elle seule le déplacement.

Quel est le résultat final ? Une œuvre que Scorsese lui-même reconnaît comme l’une de ses plus faibles, faute à un manque de rigueur, d’un scénario bancal et d’une dépendance aux stupéfiants qui avait gâté la capacité de Scorsese à faire des films. Si seulement…

Note : **

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