vendredi 26 décembre 2008

Be kind rewind


La nostalgie au cinéma, c’est tout un art. La poésie, c’est encore plus difficile. Le bricolage, c’est carrément du suicide. Pourtant, cela n’a pas empêché Michel Gondry d’en faire ses marques de fabrique, pour le meilleur et le moins bon, comme Be Kind Rewind.

L’idée de base : un vidéoclub déclinant (concurrence du dvd oblige) n’a pas d’autres solutions après un petit incidence magnétique que de faire des remakes de films célèbres et les louer aux clients, qui chose surprenante deviennent fans. Le concept de Be Kind Rewind est proche d'un épisode de la série américaine The Amanda Show, diffusée aux Etats-Unis de 1999 à 2000. Dans cet épisode, des propriétaires de vidéoclubs malveillants louaient des parodies de films célèbres où ils jouaient eux-mêmes les héros.

Gondry, c’est un fondu de cinéma autant qu’un mec qui aime jouer avec du carton, des ficelles et de l’émotion. Be Kind Rewind (qui doit son titre aux mentions sur les anciennes vhs des vidéoclubs) c’est un retour aux vraies valeurs : la sincérité, c’est le gage d’un film apprécié. Ca doit être pour ça que l’on aime Michel Gondry, car force est d’admettre que si ses films sont sincères, ils sont loin d’être parfaits : problèmes de rythme, scénario tiré en longueur, explosions de bons sentiments sont autant de failles dans les diamants bruts que sont les films du cinéaste. Un manque de rigueur scénaristique le plus souvent, fort heureusement pallié par une inventivité de tous les instants à la mise en scène.

Ici, le cinéaste fait appel aux souvenirs des cinéphiles. Pas la nouvelle génération, qui se demande tout au long du film ce que sont ces gros trucs noirs avec une bande magnétique. Faisons alors un petit historique pour eux : le format VHS est apparu à la fin des années 70 et a immédiatement connu un immense succès. Premier support capable d'enregistrer des programmes, sa large diffusion vient surtout de son faible coût et de sa facilité d'utilisation. D'une qualité visuelle et sonore bien inférieure à celle d'un DVD, la cassette VHS souffre toutefois de gros problèmes d'usure, la bande magnétique se dégradant au fur et à mesure des utilisations, et pouvant même être démagnétisée par erreur. Le format est remplacé au début des années 2000 par le DVD, mais sa large diffusion fait qu'il est encore possible de s'en procurer. C’est surtout pour les plus de 15 ans un objet sacré : c’est ainsi que l’on a regardé les classiques de Disney, ce sont ces objets du désir que l’on piquait dans l’armoire de papa qui nous jugeait trop petit pour regarder Alien ou Frankenstein, c’est comme ça qu’on a découvert qui était Little Big Man. Qui n’a jamais passé son temps à copier les films loués, histoire de dire que « moi aussi, j’ai Taxi Driver dans ma collection maintenant ! ». Ces gros trucs noirs que l’on payait parfois 20 euros (le double du prix d’un dvd !) pour avoir Il était une fois dans l’Ouest.

Ces vhs, qui procurent encore du plaisir aux nostalgiques (dont j’avoue faire partie), même si le son est plein de crissement et l’image à peine nette, font partie de la vieille époque. L’époque des films ici « suédés » : 2001 : l'odyssée de l'espace, Rocky, Ghostbusters, When we were Kings, Robocop, Boyz'n the Hood, Le Roi Lion ou Rush Hour 2. Des films que Gondry ne parodie pas, non, mais plutôt à qui ilm rend hommage à sa manière : avec 2 sous et beaucoup d’imagination. La batterie d’une machine à laver devient le Discovery, un carton devient l’Empire State Building, une guirlande devient un rayon laser. Ce qui passerait pour un très mauvais effet de série Z devient chez Gondry une déclaration d’amour (d’humour ?) irrésistible. Et propulse Be Kind Rewind au sommet de sa magie, aussi courte soit-elle à trop tirer sur la corde et à ne pas permettre aux acteurs de se donner pleinement (Black fait du Black, Mia Farrow et Sigourney Weaver sont trop rares, seul Danny Glover tire son épingle du jeu).

Pas un grand film donc, mais un grand cri d’amour : aux films fauchés, aux films sincères, bref au cinéma. Et rien que ça, ben ça mérite de dire merci monsieur Gondry.

Note : ***

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