jeudi 11 janvier 2007

Marie-Antoinette


A en croire la fille d’un des plus grands cinéastes de tous les temps, la vie d’une adolescente n’est vraiment pas cool. Et pour continuer son analyse de la pauvre petite fille déconnectée du monde dans lequel elle évolue, Sofia Coppola signe Marie-Antoinette.

Sofia n’abandonne pas son sujet de prédilection en effet, sujet qu’elle exploite depuis New York Stories avec l’aide de papa. Puis Virgin Suicides a été comme une bombe, la soi-disante révélation, tandis que Lost in translation semblait marquer un élargissement du sujet à l’homme. Alors bon, on doit se dire qu’avec Marie-Antoinette, Sofia continue son voyage mais que, finalement, elle semble un peu tourner en rond.

Le film regorge pourtant d’idées intéressantes ; outre le classique « plus on st riches plus la vie semble triste », c’est surtout dans la conception de sa b.o. que Coppola surprend : une majorité de musiques seventies et eighties pour la reine du XVIIIe S. Alors ouais, ça paraît fun mais il y a plus que ça : Coppola permet ainsi une déconnexion temporelle, un mélange du passé avec le présent. Comme si l’histoire de Marie-Antoinette était encore d’actualité, mais c’est surtout pour montrer que Marie-Antoinette n’a pas sa place dans l’univers qu’elle évolue. La mélancolie de Coppola n’a jamais aussi frappante et aussi clairement définie.

La cinéaste, qui a obtenu l’autorisation exceptionnelle de tourne dans le véritable château de Versailles (et même la galerie des Glaces et le petit théâtre privé de la reine), est fière de ses décors et le prouve : la majorité des plans sont des plans d’ensemble. C’est beau en effet, mais du coup cela paraît trop distant pour nous séduire. Les décors ont la classe, les costumes en mettent plein la vue, même les pâtisseries font rêver, mais derrière tout ça un manque d’humanisation. A trop s’attarder sur l’esthétique, Sofia en oublie le principal, son sujet.

La complexité du récit également, non pas dans la narration que dans le nombre de personnages et de thèmes à aborder semblent dépasser la Coppola. Du coup, on se farcit les angoisses de l’impuissance du roi, mais on oublie de parler de la France elle-même, la prérévolutionnaire qui va changer la face du monde moderne. Ainsi le final semble incongru, d’une logique absolue certes mais bien mal exploitée. Et puis les orgies de sucreries, c’est bien un peu, mais là on frôle l’indigestion.

On ne peut cependant pas blâmer les acteurs. Kirsten Dunst, probablement l’actrice fétiche en devenir de Coppola, saisit toutes les nuances de son personnage et lui donne une image nouvelle, plus proche de l’idéologie de Coppola que de l’Histoire certainement. Elle n’hésite cependant pas à donner ce qu’elle peut, même son (splendide) corps, pour bluffer le spectateur. Le niveau de seconds rôles comme Steve Coogan ou Judy Davis l’aidant à se surpasser, on assiste à une interprétation globale de qualité.

Sofia Coppola continue donc d’explorer un univers certes peu abordé au cinéma sauf qu’à force, elle ne semble pas se renouveler, et ne semble pas non plus en mesure d’assumer de grosses productions. Pour preuve, c’est bien le côté intimiste parfois présent de Marie-Antoinette qui permet au spectateur de rester en place et de regarder jusqu’au bout cette (trop longue) évocation de la plus célèbre Reine de France.

Note : **

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