mercredi 8 juillet 2009

Alexandre Nevski (Александр Невский)


Camarade ! L’œuvre est venue de parler d’un cinéaste majeur ! D’un cinéaste incroyable ! Cinéphiles de tous les pays, unissez-vous !

Alexandre Nevski est ce qu’on appelle un héros : jeune prince et surtout militaire de génie, il a en effet réussi coup sur coup à vaincre les Suédois et les Allemands qui venaient envahir la Russie. Alors quand Staline a besoin de rassurer le peuple en 1938, devinez à quoi il pense ?

Car bien évidemment, c'est une oeuvre propagandiste en plein : comment au 13e siècle les Russes ont repoussés les vilains Teutons grâce à leur persévérance et, surtout, leur leader charismatique... Inutile de faire un dessin. Il paraît qu’Hitler n’aimait pas trop le film d’ailleurs… Eisenstein non plus d’ailleurs : étroitement surveillé, il dut aussi travailler avec des techniciens et des acteurs membres du parti qui, franchement, sont très moyens. Autres défauts à mes yeux : un sentimentalisme assez limite et des dialogues qui ne démontrent qu'une chose : qu'Eisenstein était plus à l'aise dans le muet.

Mais il serait bien stupide de croire que Eisenstein ne s’en sortirait pas ! La Grève, Le cuirassé Potemkine, Octobre avaient déjà démontrés qu’au sein même d’une œuvre de propagande, le cinéaste savait dépasser ses limites, appliquer ses théories sur le cinéma et rester un metteur en scène incroyable.

Ici, c’est la théorie du contrepoint qu’Eisenstein applique : contrepoints visuels (le blanc contre le noir, l’armure envahissante contre la cote de mailles, etc.) mais en plus, le cinéaste s'amuse à se moquer de son propre film, utilisant le contrepoint entre l'image et le son (la musique enjouée de Prokofiev qui dédramatise la scène de combat ou de mort).Ultime audace, il privilégie même l'individu à la masse (ce qui colle moyen avec le communisme...). Et si on échappe pas à des scènes assez bateau (les braves artisans refusant de s’écraser comme ces vils bourgeois), il subsiste de très grandes scènes, notamment les massacres des Teutons dans le village (les jets d’enfants dans le feu sont horribles) et la fameuse (et longue) scène de bataille sur la glace, qui contient en effet de grands moments.

C’est sans doute pour cette capacité à se détacher de la propagande au profit d’une véritable recherche (parfois expérimentale) qu’Eisenstein a su traverser les années sans perdre de son aura : ses films restent d’une étonnante modernité (surtout les muets à mes yeux) et sont de telles leçons de mise en scène que toute personne voulant comprendre le cinéma devrait connaître ses films sur le bout des doigts. Et ça, à part 2-3 autres cinéastes, c’est plutôt rare…

Note : ***

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