lundi 19 septembre 2005

Sueurs froides (Vertigo)


Un des films les plus étranges, pour moi, d’Alfred Hitchcock que ce Vertigo.

En effet, le maître du suspens quitte quelques instants la réalité, bien qu’il la déformait souvent au profit de situations invraisemblables, pour s’introduire dans le fantastique : cette mystérieuse blonde est-elle réellement la réincarnation d’une femme ayant vécu des années auparavant ?

Bien sûr, ceci n’est que prétexte à une série de fausses pistes comme les créait si bien le maître Hitchcock, et vers la moitié du film on comprend enfin le vrai sens de l’intrigue ; c’est peut-être là que le film déstabilise le spectateur, contrairement à La mort aux trousses : dans ce dernier, on pouvait encore se demander comment Cary Grant allait rétablir sa vie, ici le sort en est jeté pour James Stewart, quoi qu’il fasse.

A noter d’ailleurs, cette interprétation transcendante de Stewart, qui n’incarne pas son personnage mais EST cet ancien flic souffrant de vertiges. C’est ainsi qu’au début, on le sent sceptique quant à cette histoire, preuve avec sa filature pas vraiment discrète ; puis interviennent ses problèmes de vertiges qui le replongent dans une haine envers lui-même. Puis quand il retrouve l’amour de sa vie, le voilà perdu cette fois dans les vertiges de la passion.

Parce que c’est ça Sueurs froides, c’est un film sur les vertiges quotidiens, provoqués par notre perception parfois faussée de la réalité : qu’est-ce qui est réel et qu’est-ce qui ne l’est pas ? Comment les choses se sont-elles vraiment passées ? Y a-t-il une vie après la mort ? Et perdre un être cher, n’est-ce pas là une certaine forme de mort ?

Bien sûr, Vertigo est aussi un sommet technique dans la carrière d’Hitchcock, non seulement au niveau de son sens du cadrage et de la composition de plan, mais aussi de la photographie qui confère au film une aura mystique et, surtout, pour cet effet repris des centaines de fois depuis : la distorsion de l’espace. En effet Hitchcock se demandait comment faire passer un vertige à l’écran de manière subjective, et c’est ainsi qu’il eut l’idée fabuleuse de filmer une maquette avec un double mouvement caméra-zoom (en gros, un zoom arrière pendant que la caméra faisait un travelling avant) ce qui créait à l’écran une perte de perspective saisissante ; depuis, cette technique a surtout été utilisée pour montrer une distance par rapport à la réalité, notamment chez Kassovitz (La haine) et surtout chez Scorsese (Raging Bull, Les affranchis…).

Un film signé Hitchcock était souvent synonyme de grand film ; ici, Sueurs froides montre que Hitchcock est probablement le plus grand cinéaste de tous les temps. Un immense chef-d’œuvre qui fini par donner… le vertige…

Note : *****

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