vendredi 6 janvier 2006

Meurtre mystérieux à Manhattan (Manhattan Murder Mystery)


Et un Woody Allen de plus qui rend hommage, un !

Sauf qu’avec Meurtre mystérieux à Manhattan, ce n’est pas à n’importe qui que l’élève rend hommage : c’est à deux noms prestigieux comme Alfred Hitchcock et Orson Welles que le plus névrosé des juifs new-yorkais se désigne fervent admirateur, sans oublier une petite séquence hommage à Billy Wilder et son Assurance sur la mort.

Reprenons un peu l’histoire depuis le début : l'éditeur Larry Lipton et son épouse Carol logent dans un luxueux appartement de Manhattan où ils se lient rapidement d'amitié avec leur voisins de palier, Paul et Lillian House. Un jour, cette dernière décède d'une crise cardiaque. Une mort étrange, la vieille dame n'ayant jamais eu de problèmes de santé majeurs. Petit à petit, l'idée d'un meurtre se précise et Carol Lipton est bien décidée à élucider ce mystère. Au programme : tentative d’intrusion dans l’appartement voisin, voyeurisme, excitation croissante… Ca vous rappelle quelque chose ? Fenêtre sur cour, exactement. Et ce n’est pas tant dans le schéma de base qu’Allen pique les idées du maître, c’est également dans son développement, jeu de faux-semblants amusant où Allen le peureux est sensé illustrer le héros type Stewart ou Grant ; il en a l’humour mais pas le physique. Qu’importe, ça lui convient parfaitement, préférant de toute évidence le dialogue pointu et jubilatoire qu’on lui connaît (« Rappelle-moi demain d’acheter tous les disques de Wagner… Et de louer une tronçonneuse ! »).

Et puis, Meurtre mystérieux à Manhattan, c’est un peu une mise au point personnelle : à l’époque, ça bat plutôt de l’aile entre Allen et sa muse Mia Farrow. D’où le retour de Diane Keaton. Et une fois n’est pas coutume, on tombe encore dans une histoire de couple usé, presque fini ; comment éviter l’écho au passé et au présent de Woody ? A souligner cette petite phrase, lourde de sens, que Woody dit à Diane : « tu sais que je t’aimerai toujours… »

Mais si Woody met la plupart du temps sa vie en avant, c’est toujours dans un esprit d’autodérision nécessaire à sa cinémato-thérapie. Et sachant qu’il ne pourra jamais égaler Hitchcock, il prend ses distances avec le sérieux et joue sur les mots et sur sa mise en scène.

Second hommage : Orson Welles et sa Dame de Shanghai, dans la partie manipulation des personnages et surtout dans un fantastique final qui fait écho à la célèbre scène des miroirs.

C’est aussi l’occasion pour Allen de se reposer les méninges, délaissant la psychanalyse pour la comédie pure et sans arrière-pensées. On est plus au temps des débuts, des Prends l’oseille et tire-toi ! et autres Bananas, mais à un âge plus avancé, où Allen n’a plus rien à prouver, pas même à soi-même, où il peut se permettre le luxe de faire un film non par besoin mais par plaisir. En découle donc la bonne ambiance et la jovialité des acteurs.

Un film allenien sans être vraiment du Allen (vis-à-vis des thématiques) mais qui, sur le fond, est un des plus bels hommages aux fondateurs du cinéma moderne : Alfred Hitchcock et Orson Welles… Un divertissement autant public que personnel pour monsieur Allen.

Note : ***

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