lundi 7 novembre 2005

Zelig


Un des plus grands chef-d’oeuvres de Woody Allen que ce Zelig !

Leonard Zelig relève, dans ces années trente, d'un cas peu ordinaire. Obèse, boxeur ou écrivain, il prend l'apparence de tous ceux qu'il côtoie. Eudora, en psychanalysant Leonard, découvre que celui-ci souffre d'un cruel besoin d'amour…

Recette d’un bon film chez Woody Allen (en général) : c’est écrit par Woody Allen, c’est réalisé par Woody Allen et c’est joué par Woody Allen. La touche qui fait la différence ? Une compagne qui sert d’actrice de premier plan, en l’occurrence Mia Farrow.

Allen retombe donc dans la nostalgie des années 30, son époque favorite, explosion de jazz, de malfrats et de jolies pépées à Broadway. Le plus intéressant dans cette optique, c’est qu’Allen y immerge totalement son film en vieillissant volontairement les images quand il ne mélange pas fiction et images documentaires.

C’est d’ailleurs une petite surprise chez Woody, les effets spéciaux. Ici, il en profite pour installer dans des images d’époque ses personnages. Cela lui permets en l’occurrence de se moquer de tout et de tout le monde, même de lui-même en poussant le vice à apparaître derrière Adolf Hitler durant un discours antisémite. Une réflexion sur sa condition de Juif sublime, la pensée d’un artiste qui décide de rire de tout et de tout le monde, puisque bien évidemment il va troubler la manifestation nazie… Dans le genre, personne n’a jamais osé franchir ce pas ; Woody Allen lui se le permet et avec une classe et un brio qui confine au génie.

Pourtant, si l’œuvre apparaît drôle de prime abord, il ne faudrait pas en oublier son message anarchiste : c’est dans la conformité que l’Homme perd son âme et, par conséquent, une vie digne. En effet, en s’adaptant à son environnement pour mieux le ridiculiser (une séance de psychologie par Allen, ça vaut vraiment le détour !) Zelig ne gêne pas, mieux il fascine ; inversement, redevenu normal, autrement dit sociable (et tout aussi conditionné par le monde) il lui arrive les pires ennuis qu’un homme puisse avoir. En ce sens, Zelig se rapproche d’œuvres comme Orange Mécanique ; la remise en question de savoir qui est dérangeant ou non entre un individu unique dans un monde qui ne lui convient pas rejoint quant à elle Vol au-dessus d’un nid de coucou.

Zelig est également une sorte de retour aux sources pour Allen qui reprend le même principe narratif que pour Prends l’oseille et tires-toi !, c’est-à-dire un mélange de scènes continues et de témoignages, même si ici il n’y a pas vraiment de scènes de dialogues : le tout est un documentaire, comme si Zelig avait réellement existé.

Bien entendu, les acteurs sont géniaux, autant que le scénario qui, sur un thème sous-jacent grave (le conformisme est obligatoire pour qui ne veut pas être jugé comme une « chose ») reste très drôle, même dans des moments qu’on aurait pu redouter tendus (le discours d’Hitler notamment, tourné en dérision de manière magistrale).

Une œuvre sublime donc, résolument anarchiste de la part d’un cinéaste lui aussi anticonformiste, qui à l’aide de ses thèmes de prédilection fait une véritable défense à la différence entre chaque homme : une œuvre universelle et prodigieusement subtile.

Note : *****

0 Comments: