dimanche 26 mars 2006

Munich


Un Spielberg semi réussi que ce Munich.

A la base, un sujet casse-gueule : la vengeance violente et sanglante d’Israël après le massacre de onze athlètes aux J.O. de Munich par le groupe Septembre Noir. Ce qui implique forcément une prise de position et, par conséquent, des divergences extrêmes un peu partout. On ne pourrait pourtant pas blâmer Spielberg, qui cette fois accepte de toucher un sujet qui ne fera pas l’unanimité (contrairement à la Shoah, un pauvre quidam bloqué dans un aéroport ou un gosse aux parents divorcés qui se met à voler les riches…). Mais il faut en avoir du génie pour réaliser un tel film sans tomber dans la facilité, la maladresse voir le parti pris intégral. Très peu de cinéastes en aurait été capables, et malheureusement Spielberg n’est pas de ceux-là.

Il y a pourtant de la part du cinéaste une volonté de bien faire : il apporte tout d’abord un soin tout particulier à la reconstitution de l’époque, de la mode vestimentaire, du style de vie… Un souci de réalisme qu’on lui connaissait pourtant bien mais qui surprend quand même. Il y a aussi une remise en question de son propre style, où Spielberg se moque de lui-même dans la scène d’Avner et de sa femme qui vient d’accoucher (« Ca fait trop mélodrame ça c’est minable ! »). Spielberg semble comprendre que sa mièvrerie habituelle et qui a sévi dans bon nombre de ses films était plus un frein qu’un plus au récit. Il délaisse également un peu plus l’action au profit d’une remise en question des valeurs d’Avner qui, tout au long du film, se met à douter de sa mission voir de lui-même. Un travail d’introspection remarquable de la part du cinéaste.

Hélas, cela ne suffit pas. A trop vouloir montrer que Spielberg peut être très mûr quand il veut, il en vient à oublier l’élément phare du film : le récit. Trop long, mal équilibré (un départ d’une pénible lenteur et un final un peu bâclé quoique tirant sur la longueur aussi), le scénario est construit comme un spectacle à part entière, d’un classicisme effrayant et d’une fausse envie de bien faire (les interminables flash-back qui viennent justifier la mission d’Avner) où parfois tout part dans tous les sens (cette scène ridicule où Avner voit la scène de l’aéroport alors qu’il fait l’amour à sa femme) sans oublier l’inutile et le dérangeant (l’image finale, ambiguë et pouvant être mal interprétée, des Twin Towers encore debout…).

Les acteurs ne relèvent guère le récit. Sans être spécialement mauvais, ils ne parviennent pas à nous faire croire en leurs personnages, à créer une distance entre leurs propres personnalités et celles des agents engagés. Eric Bana semble par moment perdu, Mathieu Kassovitz (image même de Spielberg dan les années 70 d’un point de vue physique) s’en sort un peu mieux que d’habitude, Daniel Craig très bon en tueur froid mais hélas pas assez effacé… On en viendrait presque à applaudir les apparitions d’un Michael Lonsdale aussi impassible et cynique que d’habitude, qui permet de donner une autre dimension aux scènes où il apparaît.

On regrettera finalement la réalisation trop plate de Spielberg, qui semble perdre un peu de son charme au profit de la qualité de l’image. C’est bête, mais on a pas l’impression d’assister à un film de Spielberg, et ça pour un cinéaste de cette envergure, c’est impardonnable. On le remerciera toutefois d’avoir inséré ci et là des moments d’humour pour nous faire passer la pilule.

Une relative déception donc, due à une durée trop longue et un travail mal réparti ; relative car Spielberg ne cherche plus à briller comme autrefois avec La liste de Schindler mais bel et bien à impressionner les copains avec des sujets difficiles à adapter sans se casser la gueule ; pas très convaincant en tout cas…

Note : **

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