vendredi 21 novembre 2008

Le silence de Lorna


Le silence de Lorna a ceci de particulier qu’il suscite deux réactions chez moi. La première, choquée : « non mais de qui se moque-t-on ?! ». La deuxième, perplexe : « Euh… Et si finalement le n’y connaissais rien en cinéma ? »

Car il faut bien dire que le cinéma des frères Dardenne, c’est pas mon truc. La misère sociale, l’absence d’humour même léger, de distance aussi, la grisaille de la météo belge ambiante, moi ça me flingue le moral. Mais je sais quand même reconnaître certains de leurs films à leur juste valeur : Rosetta est très impressionnant par moments, tout comme Le Fils est intéressant sur un plan cinématographique. Mais, pour moi, ça s’arrête là. Pas de quoi les proclamer génies du septième art. Pourtant, la critique s’accorde à dire depuis une dizaine d’années qu’ils sont surdoués : Cannes fait figure de proue en récompensant systématiquement leur film en compétition (ce qui a permis 2 Palme d’Or, un Prix d’interprétation masculine et pour Lorna un Prix du meilleur scénario), décernés par des jurys que l’on soupçonnerait pas de ce bord-là. D’où questionnement : est-ce moi qui ne comprend rien à leurs films ou est-ce les critiques qui font preuve d’un consensualisme envers le festival qui présente les films ?

Car récompenser le scénario de Lorna, ce serait comme décerner le prix de la meilleure friterie à McDonald : une hérésie. Celui du Fils eut mérité beaucoup plus ce prix par exemple. Ici, rien de neuf sous la pluie belge : le monde est pourri, corrompu, les pauvres petits gens (ici une immigrée, petit changement il est vrai) essaient de s’en sortir comme ils peuvent. Autre changement important j’oubliais : l’action de ne se déroule plus à Seraing mais à Liège. Où est la différence ? Dans la réalité, il y en a une : chez les frères, il n’y en a pas. Liège, c’est moche, c’est Mafia City, c’est une ville de paumés, de chômeurs, de junkies et j’en passe. L’endroit idéal pour les vacances en somme. A croire que, personnellement, je n’ai vu la vraie face de Liège, car tout ceci me paraît surfait, stéréotypé. Et en plus d’enfiler une série de clichés, le scénario souffre d’un sérieux manque de cohérence par moments, certaines ellipses s’avérant parfois vraiment gênantes (et dont on ne comprend le sens que 10 minutes après).

Autre non-surprise : le casting. Arta Dobroshi, actrice principale (qui a appris le français pour le rôle) est, il est vrai, touchante de sincérité, d’authenticité. Pour le reste, que des visages connus : Fabrizio Rongione (en malfrat encore après L’enfant), Jérémie Renier (en paumé, comme d’hab), Olivier Gourmet (en clin d’œil, histoire de dire qu’il est venu) et Morgan Marinne (qui semble avoir du mal à percer).

Il existe cependant un point intéressant : la mise en scène. La volonté de la caméra portée pour plus de réalisme, habituelle chez les Dardenne, cède ici la place à une caméra plus calme, plus posée, ne cherchant plus à découvrir ce qui se cache au-delà des choses mais se contentant de filmer ce qui se passe devant elle. Le passage au 35 mm semble avoir amené les frères à une image plus stable, moins froide, et sincèrement cela fait du bien. A noter aussi la scène finale, qui bien que tirant en longueur est assez poétique et significative.

Mais le manque de distance finit bien à un moment ou l’autre à agacer : pas d’humour, pas de musique, rien, et c’est l’ennui qui s’installe. C’est dommage car Le silence de Lorna aurait pu être un très bon film. Mais les frères ne semblent plus au fil de leur filmographie que se répéter, sans trop varier (ils devraient sans doute demander conseil à Woody Allen). Mais le grand danger est que l’on risque de limiter le cinéma belge à ce type de films – ce qui serait, croyez-moi, une grave erreur.

Note : **

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