dimanche 25 février 2007

Pulp Fiction


Des tueurs qui ont la classe, une overdose, un cadavre a faire disparaître, une arnaque, deux frères homosexuels, des hamburgers, un chopper, des références de films encore et encore, ça vous rappelle quelque chose ? Eh oui, c’est bien Pulp Fiction !

Beaucoup de choses ont déjà été dite sur ce film, encore plus son créateur Quentin Tarantino : cinéphile absolu, capable de dire dans quel film a joué le fils de la voisine de votre tante, qui avoue lui-même ne rien à avoir emprunté aux films mais les a simplement volé, fan de série B voir Z, pour qui le cinéma de genre est une vraie drogue. Pulp Fiction, grosse claque de 1994, Palme d’Or au Festival de Cannes, Oscar du Meilleur Scénario avec 7 autres nominations à la clé, qui met en avant des tueurs, des gangsters, des toxicomanes et des pervers, sans oublier leur propension à citer le mot « fuck » (281 fois dans ce film), interprétés par une pléiade d’acteurs dont les noms les moins célèbres ne le sont pas restés longtemps (en plus, c’est près de 5/8 du budget qui st passé dans leurs salaires, imaginez leur niveau…). Alors, franchement, que dire de plus qui pourrait s’avérer constructif ?

Bah peut-être de souligner des éléments que l’on a tendance à oublier ou ne pas remarquer. Premier exemple, la continuité et la cohérence des films de Tarantino entre eux. Il y a bien sûr la famille Vega, Vic dans Reservoir Dogs et Vincent ici. Mais les autres références pullulent : les répliques qui voyagent entre les films (notamment dans True Romance), les Big Kahuna Burger (présents dans Reservoir Dogs et Une nuit en enfer) et des tas d’autres détails ironiques, comme cette pauvre femme qui se prend une balle de la part de Marcellus Wallace après l’accident de voiture (c’était déjà elle qui se faisait tuer dans Reservoir Dogs !). De fait, le film de Tarantino devient double : indépendant du reste de la filmographie du cinéaste mais aussi rattaché aux autres œuvres de ce dernier par une série d’éléments qui feront sourire les cinéphiles et les fans inconditionnels de QT. Et qui prouve déjà que Tarantino est calculateur.

Un autre fait est le côté perfectionniste de Tarantino. Je m’explique par un exemple : la scène d’intro. De fait, lorsque nous la regardons la première fois, rien d’exceptionnel. Maintenant, analysons le cadrage, l’arrière-plan et la bande sonore : vous distinguerez, dans un cadre spécialement prévu pour, Vincent Vega se rendre aux toilettes, après avoir entendu sa discussion avec Jules, et tout ça dans les 5 premières minutes !
Pour le casting, Tarantino n’est pas spécialement un « résurrecteur » d’acteurs finis (en l’occurrence, John Travolta) mais fait prévaloir avant tout son récit, quitte à inventer des personnages pour des amis (Harvey Keitel ou Steve Buscemi ici). Pour preuve, les noms refusés (ou qui ont refusé, on ne sait pas trop) : Daniel Day-Lewis, Mickey Rourke, Matt Dillon, Sylvester Stallone, Michelle Pfeiffer, Daryl Hannah, Meg Ryan, Joan Cusack et Isabella Rossellini. Pour l’anecdote, Tarantino aurait souhaité avoir Kurt Cobain et Courtney Love dans le rôle du couple junkie Lance et Judy… Autrement, pour les autres, rien à redire c’est certain, même si bien évidemment certains s’en tirent mieux que d’autres : John Travolta, Uma Thurman, Bruce Willis mais surtout Samuel L. Jackson dont la prestation est hélas passée trop inaperçue à l’époque.

En revanche, il est vrai que Tarantino n’a rien inventé : le look d’Uma Thurman vient du personnage d’Anna Karina dans Bande à part de Godard, Bruce Willis reprend une réplique de John Wayne dans Rio Bravo tandis qu’Uma Thurman chante du Easy Rider, cette dernière danse à la manière des Aristochats et John Travolta à la Adam West ans Batman (1966), le plateau du Jack Rabbit Slims s’inspire du film A plein tube et de Ligne rouge 7000… Même le titre provient d’un film de la blaxploitation !

En revanche, il sait manier la plume pour pondre un scénario somme toute très simple mais construit assez brillamment pour passer comme chef-d’œuvre. Qu’en serait-il sincèrement si le scénario suivait sa chronologie de base ? Rien de bien excitant, mais ici en revanche, tout devient intéressant : on quitte John Travolta en vie, Samuel L. Jackson a sa révélation, Bruce Willis échappe à Marcellus… Même notre couple d’introduction s’en sortent sans dommage. De plus, petite subtilité (elle aussi héritée d’un film plus ancien : En quatrième vitesse de Robert Aldrich): le contenu de la valise n’est jamais dévoilé. Explications possibles :

Il s’agit de la veste dorée d’Elvis, visible dans… True Romance.
Il s’agit de l’âme de Marcellus Wallace : la théorie a déjà été largement exploitée (la blessure de Marcellus, l’illumination de ceux qui approche la mallette) mais est largement esquintée par les déclarations de Tarantino qui précise que le pansement à l’arrière du crâne de Ving Rhames n’avai rien de cinématographique !
Une simple lampe ? (au scandale !)
Des diamants (comme dans le script original, selon Roger Avary, mais vu le coût ils auraient choisis de simplement ne pas les montrer)
Une arme nucléaire (comme dans En quatrième vitesse)
Selon Quentin Tarantino himself : « [Le contenu] est tout ce que le spectateur désire que cela soit. »

Le seul bémol est que Tarantino ne soit pas encore à son apogée technique : si sa réalisation est plus que bonne, elle n’est pas encore aussi aboutie que le sera Jackie Brown ou aussi virtuose que le sera Kill Bill. Il y a aussi un léger manque de personnalité par moment, même si 90% du film est purement « tarantinien ».

Une véritable claque à l’époque, qui mérite aujourd’hui d’être reconsidérée comme autre qu’œuvre culte : si les scènes de sniffes et la seringue dans le cœur font toujours mouche, la plus jolie scène reste sans doute ce monologue final de Jules sur sa révélation. C’est là qu’on se dit que Pulp Fiction est un grand film. Tout simplement.

Note : ****

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