lundi 12 mars 2007

JFK


Si bon nombre de film sont inspirés de faits divers, plus rares sont ceux qui prennent des événements mondialement célèbres, surtout lorsque ceux-ci sont les sujets de polémiques on ne peut plus virulentes. Fidèle à sa réputation, Oliver Stone n’a pas eu froid aux yeux en décidant de relancer l’enquête sur la mort du Président des Etats-Unis, JFK.

Inutile de rappeler les faits mais bon : en 1963, le 22 novembre à Dallas, l’un des présidents des USA les plus adulés de tous les temps se fait tirer dessus lors d’un défilé. Il n’en sortira pas indemne. Une enquête est lancée sur un assassin présumé, Lee Harvey Oswald, lui aussi assassiné peu après les faits. Elle conclut à un acte solitaire de ce dernier, et le dossier est refermé. Sauf qu’un procureur, Jim Garrison, relance l’affaire et établit une théorie qui relève du complot national, où mafia, communistes et gouvernement US se seraient alliés pour éliminer le danger que représentait Kennedy pour Cuba et le Vietnam.

Une telle hypothèse de départ est en elle-même source de conflit : des miliaires tuant leur supérieur pour se battre au Vietnam ? Pour tenter de se débarrasser de Castro ? Au fil du récit, Stone parvient pourtant à nous faire croire à 100% à cette théorie, sur base du livre de Jim Garrison et de 24 chercheurs ayant travaillés sur le scénario. Il faut avouer que les arguments avancés sont convaincants, et le fait que le Congrès ait voté le « Assassinations Disclosure Act » (qui permet au peuple américain de connaître les raisons de certains meurtres après un nombre d’années déterminé) après avoir vu le film on joué en sa faveur… C’est d’ailleurs ce qui gêne un peu dans ce film, cette manière d’imposer son idée face aux autres, alors qu’il ne s’agit que d’une simple théorie dont nous ne pourrons avoir confirmation qu’en… 2029.

Autrement, le film permet à Oliver Stone d’atteindre le sommet de sa carrière (rien d’étonnant à ce que cela soit son propre film préféré) et de sa réputation puisque le film est considéré comme le 5ème film le plus controversé de tous les temps. Il faut dire qu’il pousse le perfectionnisme dans le moindre détail (exemple flagrant : la reconstruction du Bureau ovale du Président a coûté près de 70 000 dollars pour 8 secondes à l’écran !). On retiendra aussi une série d’images mémorables, comme ce plan très simple de Garrison assis sur un banc, venant d’apprendre la vérité sur le meurtre de Kennedy avec en arrière-plan l’obélisque de Washington… Calme, réfléchie sans oublier d’être agressive, la mise en scène d’Oliver Stone a de quoi impressionner le plus buté de ses opposants, soyons honnêtes.

Même Kevin Costner parvient à nous séduire. Ce serait facile de lui jeter la pierre, de dire qu’Harrison Ford ou Mel Gibson (qui ont refusé le rôle) auraient pu mieux faire ; durant 3h10, il parvient à imposer son jeu de manière à ce que l’on ne l’oublie pas dans le reste du casting, tout simplement prodigieux (Tommy Lee Jones, Sissy Spacek, Gary Oldman, Michael Rooker, Joe Pesci, Jack Lemmon, Walther Matthau, Kevin Bacon, John Candy, Donald Sutherland, Vincent D’Onofrio… excusez du peu !). Ce sont pourtant Jones et Oldman qui l’emportent, chacun parvenant à créer une dimension quasi-tragique à leurs personnages respectifs (il faut dire que les références à Shakespeare pullulent dans les dialogues).

Le scénario, hormis le fait qu’il impose ses idées, est d’une construction quasi parfaite, Stone ayant clairement compris toutes les subtilités de l’écriture cinématographique. Hélas, le film faiblit sur la fin avec ce discours sensé sensibiliser le public… Un tort car sans ce passage (qui n’a jamais eu lieu d’ailleurs), le film aurait gagné en intensité dramatique.

Une œuvre engagée, archétype du film politique où Stone est tout simplement au firmament de son œuvre et de son style. Reste à savoir si, d’ici quelques années, le film restera de la fiction ou deviendra un documentaire…

Note : ****

0 Comments: