lundi 3 août 2009

Les vacances de monsieur Hulot


En 1953, il n’y a guère que 17 ans qui se sont écoulés depuis les premiers congés payés. Un phénomène assez vieux pour s’y être habitué mais encore assez jeune pour s’en moquer, comme le fera Tati avec ses Vacances de monsieur Hulot.

Les liens entre Jacques Tati et le burlesque sont assez évidents : d’une part, Hulot est le personnage-type comme l’était Max pour Max Linder, Charlot pour Chaplin ou Malec pour Buster Keaton. Ensuite, Tati attache beaucoup d’importance au visuel, aux gags et slapsticks en tout genre. Enfin, ses films sont plus une enfilade de saynètes qu’un véritable récit uniforme. Mais Tati est aussi un cinéaste on ne peut plus moderne : son utilisation du son, notamment, est admirable. Si dans Jour de fête il n’osait écorcher la langue de Molière que par des accents campagnards, il n’hésite plus (et n’hésitera plus) à bouleverser l’ordre des sons dans un film (voix-musique-bruits pour bruits-musique-voix) pour souligner son lien avec le cinéma muet d’une part, mais pour tirer profit au maximum des différents gags qu’ils pourraient produire. Enfin, Tati possède un sens du cadrage remarquable, occupant TOUT le champ et allant même jusqu’à créer, parfois, des gags à double profondeur (lavant et l’arrière-plan). La séquence, très simple, de Hulot angoissant pour la guimauve qui tombe en est un exemple assez illustre.

Mais tout cela, c’est d’un point de vue technique, car il y a bien plus que cela. Fin subversif, Tati n’hésite pas à rire de tout et surtout de tout le monde dans son film. La mort est tournée en dérision, l’intellectuel est rendu inaudible, le général est ridicule, le vacancier accroché au téléphone ne profite pas de ses vacances, le vieux couple s’ennuie… Pour Tati, il semblerait que les vacances, c'est une autre forme d'aliénation et de métro-boulot-dodo des vacanciers : les même repas dans le même restaurant, les mêmes activités en soirée (et interdiction de les modifier par un quelconque bal masqué)… Tati se moque, gentiment, mais assez violemment de ce simulacre de détente.

Cinéaste inclassable et, surtout, on ne peut plus original (et même unique), Tati était bien l’un des grands maîtres du cinéma moderne que bien plus de spectateurs devraient connaître. Qu’on se le dise !

Note : ****

0 Comments: