lundi 15 novembre 2010

Gomorra

Le message de Gomorra est d’une certaine subtilité, et je dois être franc d’une certaine originalité : la Mafia, c’est le Mal, je dirais même, c’est PAS bien. Merci. J’ignorais.

Évidemment que c'est un fléau pour ceux qui y sont confrontés. Évidemment qu'ils sont partout et intouchables. Évidemment qu'ils ne plaisantent pas. Évidemment qu'une fois qu'on s’y frotte, on traîne déjà avec soi une odeur de sapin. Mais tout de même : il ne faut pas souligner aux gros traits ces différents points pour faire entendre ce discours. Par son parti-pris réaliste, Gomorra semble s’opposer à ces films-références sur l’univers de la mafia : le Parrain, Scarface, les Affranchis, Casino… N’est-ce pas occulter que, sous leurs airs virtuoses ou baroques, ils énoncent tous le même discours : quiconque se risquera à cette vie finira soit seul et malheureux soit entre quatre planches ? A-t-on besoin d’asséner pendant 2h30 un discours moralisateur et appuyé pour dire que, non, la mafia n’est pas quelque chose qui fait rêver mais bien une organisation criminelle dangereuse, aussi bien pour les autres que pour ceux qui en font partie ?

Gomorra est cinématographiquement pauvre. Il ne se passe pas grand chose, ça parle beaucoup, ça manque cruellement d’invention, d’audace, d’imagination visuelle. Ca manque aussi de tension, de rythme, de personnages attachants. L’approche documentaire (morne) enchaîne les séquences à la « à peu près », frôlant le voyeurisme plus d’une fois. Je ne sais même pas si on peut dire que c’est bien filmé tant tout semble brouillon. Et dire que, la même année, Paolo Sorrentini nous proposait son magistral Il Divo sur un thème similaire…

Bien sûr, il faut rendre justice à une pléiade d’acteurs convaincants et de ci de là des moments intéressants, mais Gomorra ne concourt pas dans n’importe quel genre : il se situe dans celui du film de gangster, l’un des plus difficiles car l’un des plus fréquentés et peuplé de grands chefs-d’œuvre. Les comparaisons sont presque inévitables, et Gomorra n’en supporte aucune, ni italienne, ni américaine, aucune. Filmer caméra à l’épaule n’accentue pas un sentiment de réalisme, ça donne juste le mal de mer. Voir la mafia escroquer des gens ou tuer des jeunes voyous n’augmente pas l’antipathie que l’on peut éprouver à son égard, elle ne la renforce même pas : tout cela a déjà été vu des centaines de fois, et bien pire encore parfois.

Je ne cache pas être curieux de lire le livre, car ce film m’a semblé contre toute attente de ma part bien fade : Matteo Garonne n’a pas le panache d’un Martin Scorsese, le sens du tragique d’un Francis Ford Coppola, le lyrisme d’un Sergio Leone, la violence d’un Brian De Palma ni même l’invention d’un Paolo Sorrentino ou la vigueur d’un Francesco Rosi. Il a le mérite d’avoir essayé, et c’est tout.

Note : *

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