lundi 16 novembre 2009

Night on Earth


Night on Earth, ou quand un cinéaste adepte des récits proches de l’enfilade de sketchs… Ben fait réellement un film à sketchs.

7:07 pm, Los Angeles
Le premier segment met en scène Gena Rowlands et Winona Ryder. Le duo fonctionne bien dans la dualité, la morale est mignonne (vit tes rêves, quels qu’ils soient) et esthétiquement c’est propre. Assez drôle, on se demande juste un peu le rapport avec le reste du film…

10:07 pm, New York
Le second segment et l’un des plus drôles avec Rome est déjà beaucoup plus jarmuschien : la rencontre improbable entre un black survolté de Brooklyn, sa belle-sœur au langage peu châtié et un chauffeur de taxi d’origine allemande. C’est la confrontation culturelle qui est ici en jeu, comme lors de cette discussion sur les prénoms respectifs des hommes (Helmut, qui ressemble presque à « helmet » ou casque en anglais, et Yo-yo). Difficile aussi de ne pas relier le personnage de Rosie Perez au « fuck » facile à celui qu’elle avait un an auparavant dans le film de Spike Lee Do the right thing. Hilarant, dynamique, doux-amer sur sa fin, probablement le meilleur segment du film.

4:07 am, Paris
Autre segment, autre thème : la différence. Cette fois, c’est un noir (Isaac de Bankolé) qui, ne supportant plus les blagues racistes et les remarques désobligeantes, prend une aveugle en stop (magnifique Béatrice Dalle). Et face à cette femme différente de par sa cécité, c’est le chauffeur qui va cette fois devenir intolérant… Ca pourrait être manichéen, c’est surtout assez drôle dans le sens de la répartie du personnage de Dalle, qui ne se laisse jamais faire. Et le final est jubilatoire.

4:07 am, Rome
L’autre segment comique du film, porté par un seul acteur : Roberto Benigni. On savait que le trublion italien pouvait être incroyable devant la caméra de Jarmusch (cfr Down by law), il est tout simplement irrésistible ici. Ou comment il tue accidentellement un prêtre en parlant de citrouille, de brebis et de sa belle-sœur ! La personnalité de l’acteur est si forte qu’elle tire tout le segment dans sa folie humoristique et rebooste le film vers les sommets.

5:07 am, Helsinki
Hélas, Jarmusch dose mal cette fois son effet de retour à l’amertume après 1h40 de rigolade. Si tout commence bien par un réveil du trio endormi et une dispute dans le taxi où tout le monde s’étrangle (du typiquement burlesque), les dernières minutes morbides effacent le sourire que l’on a pu avoir jusque là pour laisser place à un choc émotionnel trop intense pour être digéré rapidement.

Ajoutant à cela que chaque acteur est bon, que Jarmusch sait comment filmer de nuit et rendre l’espace restreint d’un taxi suffisamment intéressant pour ne pas être pesant, et que la musique leitmotiv de Tom Waits est, à l’image du film, douce-amer, et on se rend vite compte que derrière sa lacune de film à sketchs (variations de rythme et inégalité des segments), Night on Earth est un pas de plus de Jarmusch dans sa réflexion sur les relations humaines. Et quelle réflexion. Un grand film de Jarmusch. Encore un.

Note : ****

1 Comment:

Eeguab said...

J'aime le cinéma de Jarmusch.Mais curieusement je ne me souviens plus mais alors plus du tout du premier sketch.