mardi 21 novembre 2006

Short Cuts


L’un des plus ambitieux et des plus cinglants films de Robert Altman que ce Short Cuts.

En effet, le cinéaste renoue ici avec sa maestria scénaristique de sa grande époque (Nashville, entre autres) en racontant l’histoire non pas d’un personnage, non pas de deux, non pas de trois mais bien de 27 Américains issus de la middle-class.

Comme à son habitude, le réalisateur-auteur a trempé sa plume dans le vinaigre pour dénoncer ce qui ne va pas dans cette Amérique que l’on surestime trop souvent : adultères, drogue, violence, meurtres, alcoolisme, autant de travers de ces Américains moyens mis en évidence dans un récit-fleuve de trois heures.

Au niveau acteurs, Altman n’a pas fait les choses à moitié, preuve avec quelques noms choisis au hasard : Julianne Moore, Tom Waits, Madeleine Stowe, Matthew Modine, Jack Lemmon, Andie McDowell, Tim Robbins, Jennifer Jason Leigh, Chris Penn, Robert Downey Jr, Anne Archer, Fred Ward… Tous, bien qu’inégaux dans leurs interprétations, sont convaincants, si bien que l’ensemble des acteurs fut récompensé d’un prix d’interprétation à la Mostra de Venise en 1993, alors que le film recevait le Lion d’Or.

Au niveau de la réalisation, Altman reste fidèle à sa réputation de grand metteur en scène, jouant dignement et sobrement avec la caméra. L’étape la plus fabuleuse de ce film n’étant d’ailleurs pas le tournage mais plutôt le montage, c’est évident, car quoi de plus difficile que de traiter autant d’histoire différentes sans perdre le fil et confondre le spectateur ?

Le film peut ainsi se voir comme l’assemblage de petits courts-métrages, sauf que de temps en temps les personnages se croisent au gré du vent et selon la volonté de l’auteur. Auteur qui, par ailleurs, insère quelques données religieuses conférant au film une aura un peu mystique, comme si ces récits de convoitise, de jalousie et de morts n’était que des récits mystiques, devant servir de leçon au reste du monde ; ainsi, entre une ouverture sur une invasion de mouches néfastes au culture (qu’on pourrait très bien remplacé par une nuée de sauterelles) et une fin sismique métaphorique, comme si l’auteur avait voulu à travers ce séisme secouer ses personnages et par-là même nos propres esprits, les références pleuvent (comme tombèrent en trombe cette nuée de grenouilles dans Magnolia, librement inspiré de Short Cuts d’ailleurs, où les similitudes entre les deux films sont abondantes (Paul Thomas Anderson reste le plus fervent admirateur d’Altman…)).

Humour, dérision, noirceur, cruauté, authenticité : voilà autant d’éléments qui font que ces récits, qui se déroule en un peu moins d’une semaine, défilent à une vitesse vertigineuse, à tel point qu’une fois le film fini, on ne se rend pas compte qu’on vient d’assister à trois heures de bonheur cinématographique…

Note : ****

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