samedi 18 décembre 2010

The Social Network

Comment rendre un sujet somme toute inintéressant (la création d'un site de sociabilité... ouais ouais...) passionnant d'un bout à l'autre ? Réponse : The Social Network.

Faut dire que quand j’ai entendu parler du « projet de film sur facebook », j’ai doucement ricané : quoi, un film sur des asociaux ? Sur des « Aujourd’hui, j’ai mangé une pomme » ? Pire, une biographie oscarisable à la Ron Howard de Mark Zuckerberg qui a réussi le pari fou de devenir LA référence du monde informatique au même titre que Google ? Sauf que voilà : le scénario est signé Aaron Sorkin (l’excellente série A la maison blanche) et la réalisation David Fincher (que l’on ne présente plus). Déjà là, ça prend une autre tournure, et force est d’admettre : The Social Network est bien loin du biopic traditionnel, et tant mieux.

Je ne m’attarderai pas trop longuement sur la réalisation de Fincher tant elle me semble de plus en plus « classique » par rapport à son passé. Mais est-ce un tort ? The Social Network aurait pu éventuellement passer avec une réalisation à la Fight Club, et devenir le film d’une génération toute entière comme le fut le film avec Brad Pitt. Toutefois, une telle approche n’aurait peut-être, finalement, pas été une si bonne manœuvre que ça, le tape-à-l’œil prenant alors le pas sur le scénario de Sorkin et s’eut été bien dommage. Au demeurant, Fincher prouve une fois encore qu’il connaît son métier sur le bout des ongles, qu’il s’agisse d’éclairer ses scènes de nuit ou encore de réaliser une séquence d’aviron surprenante sur fond de Peer Gynt remixé (la b.o. de Trent Reznor et Atticus Ross est, au passage, tout simplement sublime par ailleurs).

Non, comme je l’ai dis, la vraie force du film réside dans son scénario. Sorkin, habile auteur, joue ainsi des codes narratifs (flash-backs entremelés) et des dialogues percutants pour nous tenir en haleine pendant 2h. Il faut dire qu’au-delà de ça, il n’y a pas grand chose à se mettre sous la dent il est vrai, et le bla bla informatique est parfois juste un peu trop pointu pour les non-initiés. Mais qu’importe, l’intérêt étant le portrait sans concession de Zuckerberg, l’homme, dans ce qu’il a de plus beau et de plus méprisable. Il y a quelque chose de shakespearien dans ce personnage, assoiffé de pouvoir et de reconnaissance et qui finit seul et détesté, comme tant d’autres mégalomanes de son genre. Tout cela est-il vrai ? Sorkin se défend des critiques, inévitables, via un dialogue avec une jeune avocate : "dans une plaidoirie, il y a 85 % d'exagération, et 15 % de parjures". Tout le cinéma hollywoodien en somme.

Enfin, je ne peux m’empêcher de parler du casting que j’ai trouvé magnifique. L’intelligence de Fincher s’illustre non seulement par un choix très judicieux (pas de stars hormis un surprenant et agréable Justin Timberlake, et que des acteurs dans la vingtaine d’années, la génération facebook en somme) et audacieux mais aussi par une direction exemplaire qui conduit chaque interprète au meilleur de lui-même, principalement Andrew Garfield et Jesse Eisenberg qui trouve certainement l’un des grands rôles de sa carrière tant il est Zuckerberg à l’écran.

Divertissement intelligent, Social Network n’est sans doute pas aussi virulent qu’il aurait pu l’être, et tant mieux : pourquoi ruer dans les brancards et perdre de la crédibilité ? En se posant comme le portrait d’un homme dans sa complexité, le film atteint les sommets du biopic hollywoodien, et Fincher de démontrer une fois encore qu’il sait s’entourer et nous conter des histoires comme personne d’autre. Si Social Network n’est pas un film culte en devenir, il n’en demeurera pas moins un film générationnel, et ça c’est suffisamment énorme pour être cité.

Note : ****

1 Comment:

neil said...

Moi j'ai été très déçu par la film. Je trouve qu'il ne se démarque pas des tonnes de "films à procès" qui existent. Qu'on apprend pas grand chose, que le sujet et les personnages ne sont pas intéressants... bref j'ai trouvé ça vide. Seule la scène de la course d'aviron a attiré mon attention.