mercredi 3 octobre 2007

Braveheart


Braveheart est ce que l’on pourrait appeler une biographie totalement fausse mais bougrement efficace d’un point de vue cinématographique.

Commençons par le début : alors qu’il se promène en Ecosse à la recherche de ses origines, le scénariste Randall Wallace découvre une statue commémorative du « plus grand héros écossais », sir William Wallace, qui eut une importance capitale durant la guerre d’indépendance de l’Ecosse. Troublé, l’écrivain va se mettre à faire des recherches et écrire un scénario dont Mel Gibson va tomber directement amoureux. Les studios acceptent alors de faire le film à la condition que Gibson en soit la vedette. Ayant du refusé par conséquent le rôle principal dans le film A tale of two cities de Terry Gilliam (film qui ne verra jamais le jour… un de plus), Mel Gibson propose au cinéaste de diriger le film, ce que Gilliam (par vengeance ou par obligation ?) refuse. Ml décide alors de se charger de la réalisation, lui qui s’est déjà fait la main sur L’homme sans visage un an plus tôt. Aidé par l’armée irlandaise pour la figuration, le cinéaste connaît quelques soucis durant la production : par exemple, la majorité des scènes de combat doivent être refaites car les figurants portent des lunettes de soleil ou des montres ; Brian Cox décline un rôle important au profit d’une apparition qui juge plus intéressante ; enfin, la fameuse bataille de Stirling demande six semaines de tournage, et près de 90 heures de rushes. A sa sortie, le succès se mêle au scandale : on accuse le film d’être hyper violent sans raison et les organismes de protection des animaux craignent que les chevaux empalés soient vrais, ce qui n’empêche pas Braveheart d’être récompensé par 5 Oscars : Meilleur film, Meilleur réalisateur, Meilleure photographie, Meilleurs maquillages et Meilleur montage d’effets sonores. Mel Gibson est désormais entré dans la cour des grands.

Parlons maintenant du côté édulcoré du film, tellement impressionnant qu’il enlève à la saveur du film. Si on peut accepter certains changements mineurs (le nom de l’épouse de Wallace devient Murron au lieu de Marianne, de crainte qu’on ne le confonde avec robin des Bois), on ne tolère pas tout, des erreurs historiques à l’occultation de vérités historiques. Par exemple, la bataille de Stirling qui ne s’est pas tenue dans un champ mais près d’un pont (Gibson répondra qu’il ne pu tourner à Stirling même à cause du pont, ce fameux pont qui permit aux Ecossais de gagner la bataille au passage), et où les Anglais n’avaient pas d’uniformes et les Ecossais ne portaient ni kilts (devenus courant seulement un siècle après l’indépendance de l’Ecosse) ni peintures de guerre (ayant disparues à la fin de l’ère romaine, soit 800 ans plus tôt). Et ce n’est pas tant des erreurs parfois discrètes (l’utilisation d’une musique irlandaise alors que l’action se déroule en Ecosse…) que des ficelles narratives qui nous font douter du film : la Princesse Isabelle n’a ansi jamai connu Wallace puisqu’elle épousa Edouard II en 1308, soit 3 ans après la mort du héros (et deux après celle d’Edouard le Sec, qui dans le film a lieu en même temps que Wallace) et n’a donc jamais eu d’enfant de lui, Edouard III étant né près de dix ans après la mort du guerrier écossais. Peut-on blâmer le scénariste cependant ? Il st vrai que les manuels d’histoire anglais ne font guère l’éloge de ce héros de la révolution écossaise, et que les poèmes de son pays eux la font sans doute trop. Il existe cependant des faits avérés (Wallace ne fut pas capturé devant le château d’Edinburgh mais à Glasgow, et Wallace fut reconnu comme un bandit de grand chemin durant toute une époque) qui, s’il est vrai qu’ils auraient rendu le personnage moins attirant et l’histoire moins romanesque, feront rire tous ceux qui se renseigneront un peu sur ce personnage historique.

Ne nous focalisons cependant pas sur l’aspect historique du film, car son aspect cinématographique se trouve être assez riche pour faire passer la pilule. Cette réussite, c’est à Mel Gibson seul que l’on la doit, qui en plus d’être un acteur confirmé possède un véritable talent en tant que réalisateur, et un souci de perfection rare dans le cinéma hollywoodien. Outre la qualité des batailles, réalistes et soignées tant au niveau de l’image (chaque image fut ainsi placée stratégiquement dans le montage pour créer un effet particulier, que ce soit choquant ou clinquant) que du son (le souci principal de Mel Gibson comme le prouveront Passion et Apocalypto), Braveheart regorge d’éléments importants pour rendre le récit intéressant : une histoire d’amour, de vengeance, de l’action, une dose d’humour, et une fascination déjà prononcée pour les décors naturels où l’Homme semble se fondre (cfr Apocalypto à nouveau). Gibson n’hésite ainsi pas à magnifier ce que la nature lui propose, fasciné sans doute par la création de Dieu en catholique convaincu qu’il est. Par expérience, il semble aussi être un bon directeur d’acteur, et habitué des films d’action possède un sens aigu du rythme au niveau du montage, qu’il veut soutenu pour Braveheart qui dure quand même 3 heures.

Des acteurs donc, qui autour de Mel Gibson font bon genre : Sophie Marceau en princesse Isabelle ou Brendan Gleeson en meilleur ami mais c’est surtout Patrick McGoohan, ancien Prisonnier de la série homonyme devenu Edouard Ier le Sec, qui vampirise l’écran dès qu’il y apparaît, d’une froideur implacable comme l’est tout méchant roi qui se respecte.

Film d’aventure mais bien plus que récit historique, dont le scénario est sans doute épique et romanesque mais ne possède que très peu de vérité, Braveheart a cependant eu le mérite de mettre au goût du jour un cinéma nouveau, celui de Mel Gibson, devenu depuis à travers des œuvres sans doutes plus personnelles un cinéaste à suivre de près, dont les films sont devenus des événements immanquables. La révélation d’un immense talent à défaut d’un grand film, il n’y a pas de quoi avoir honte.

Note : ***

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