samedi 1 mai 2010

Steamboat Bill Jr

Comment faire un bon film de Buster Keaton ? La recette est simple mais difficile à exécuter.

Tout d’abord, prenez une histoire d’amour jouée d’avance. Chez Keaton, il n’est nul besoin (la plupart du temps) de conquérir la demoiselle mais de la reconquérir. L’avantage c’est que, de la sorte, la romance ne domine pas le récit, tout en restant le moteur dramatique de l’histoire puisque le personnage de Keaton se surpassera et affrontera tous les dangers pour sa belle.

Prenez ensuite une bonne dose d’humour moderne. Attention, je ne dis pas que Buster Keaton n’a pas recourt à des slapsticks comme les autres comiques du burlesque : lui aussi glisse, tombe, se cogne etc. mais la force comique de Keaton réside pourtant dans une certaine subtilité ou, ce qui est plus ironique, dans des blagues et jeux de mots dans les cartons de texte (je trouve cela ironique dans la mesure où Keaton jouait beaucoup sur les mots… et ne passa jamais le cap du parlant).

Mixer le tout de manière assez équilibrée, sauf dans les 20 dernières minutes. En effet, comptez un bon tiers d’exposition du récit (en gros une transposition moderne de Roméo et Juliette), un second tiers regorgeant de quelques gags et au sein duquel, bien souvent, Buster perd tout, et enfin un dernier tiers enlevé et souvent anthologique dans l’enchaînement des gags et, surtout, des cascades. Ici, en l’occurrence, la séquence de la tempête est inoubliable, Keaton tentant désespérément de se sortir vivant d’un piège grandeur… nature. Le point d’orgue revient certainement à ce plan, hallucinant, où une façade de maison tombe à plat sur lui, qui ne doit sa survie qu’à une petite fenêtre. Immense !



Mais que serait tout cela sans Buster. Cet homme pour qui le cinéma était plus qu’un divertissement. Cet artiste pour qui le burlesque devait reposer sur une précision chirurgicale et des gags extrêmement calculés, cet acteur qui privilégiait le plan d’ensemble au gros plan, car ce qui comptait ce n’était pas lui mais bien la scène. Ce petit gaillard qui, contrairement à Max Linder ou Charlie Chaplin, ne s’était pas inventé un personnage type, mais restait naturel, une sorte de monsieur tout le monde capable de se sortir de n’importe quelle situation et de finalement trouver l’amour. C’est peut-être pour toutes ces raisons, et d’autres encore, que je préfère Buster Keaton à Charlie Chaplin…

Note : ****

1 Comment:

Thomas Grascoeur said...

Hilarant, spectaculaire et tragique...