jeudi 30 avril 2009

The Fall


Il était une fois un cinéaste visionnaire. Il avait déjà réalisé un film pour le moins surprenant avec The Cell, où la fouille de l’Inconscient d’un serial-killer. Ce cinéaste s’appelait Tarsem Singh et malgré son succès en publicité, clip et télévision, il avait bien du mal à trouver de l’argent pour les films de cinéma.

Six ans après The Cell, il rencontra deux autres cinéastes visionnaires qui décidèrent de l’aider : David Fincher, le visuel, et Spike Jonze, le décalé. Ensemble, ils décidèrent de produire le film de Tarsem, qui s’intitulerait The Fall, symbolisant ainsi le point de départ du film (les deux personnages principaux sont à l’hôpital suite à une chute) mais aussi la chute aux enfers de la dépendance…

Tarsem une fois au travail fut visuellement prodigieux : inspiré par les univers fantasques de Terry Gilliam, Guillermo Del Toro ou Jodorowsky, mélangeant les couleurs chatoyantes, le noir et blanc, le théâtre, l’opéra et même l’animation en stop-motion pour une séance de délire percutante, le cinéaste n’hésita pas une seconde dans son film à épater le spectateur, tant par ses décors (trouvés dans pas moins de 18 pays) que dans ses costumes soignés.

Hélas, le pauvre Tarsem, si doué soit-il pour en mettre plein les yeux, possédait quelques lacunes au niveau de sa façon de raconter des histoires : après un début savoureux (notamment une scène d’introduction au ralenti remarquable avec la symphonie n°7 de Beethoven, qui donne bien vite le ton fantastique que va prendre le film) et une première heure où aventure, humour et réflexion sur la relation monde adulte-monde de l’enfance cohabitent, le film hélas perd de sa fougue dans sa troisième demi-heure, un brin convenue, moins passionnante car moins envolée, avant de sombrer dans une dernière demi-heure consternante de facilité (des morts de héros à grands coups de violons, des effets mélodramatiques inutiles pour tirer les larmes aux spectateurs), à peine sauvée par un épilogue il est vrai emprunt d’humilité et d’amour pour le cinéma et ses héros méconnus, les cascadeurs, surtout les premiers, de Buster Keaton à Harold Lloyd.

De plus, l’humble conteur de cette histoire ne put s’empêcher de penser au Labyrinthe de Pan, où là aussi le cinéaste démontre comment parler d'une situation grave de manière détournée. Mais là où Guillermo Del Toro abordait le franquisme et la perte de l’enfance, Tarsem Singh ne semblait parler que d’une peine de cœur et des tendances suicidaires d'un cascadeur dépressif devenu accroc à la morphine.

Bref, l’aventure de Tarsem fut hélas boudée par le public : il faut admettre que cela semblait un peu trop léger par rapport a sa forme très soignée : le visuel ne fait pas tout, même au cinéma. En l’occurrence, c’est bien dommage, car potentiel il y avait. Dans une autre histoire, peut-être…

Note : ***

lundi 27 avril 2009

A Very British Gangster


Attention, documentaire !

Non mais je tiens à préciser car moi-même, en regardant le film, le doute m’a assailli plus d’une fois. Pas tant par son sujet (encore que…) que par sa mise en scène très pop (esthétisme soigné, b.o. admirable avec majoritairement des morceaux du groupe Oasis) avec en bonus des mouvements de caméra faits à la grue (du moins semble-t-il).

Mais A Very British Gangster est bel et bien un documentaire sur Dominic Noonan, parrain de la mafia locale de Manchester. Son quotidien, son autoportrait (le journaliste intervenant peu) fait avec sincérité (il admet son homosexualité), une certaine dérision et une intelligence rare (il parvient ainsi à faire comprendre qu’il est l’auteur de plusieurs méfaits sans jamais l’avouer directement). Mais il y a au-delà du portait sociologique d’une mafia « familiale » une dimension sociale plus importante : à travers Dominic Noonan, c'est toute la misère de la sous-classe ouvrière anglaise qui résonne, les laissés pour compte de l’époque Tony Blair quand il fait, lui, le gangster, le boulot que devrait faire le gouvernement ou la police. Il n'en est pas pour autant un Robin des Bois moderne : vol, extorsion, racket, kidnapping et torture, meurtre sont ainsi des éléments de sa vie, pour ne pas dire de son quotidien. Et quand il offre un feu d’artifice aux enfants du quartier, c’est dans l’ambition non-avouée de recruter de futurs petits bras droits.

Le documentaire soulève aussi une question cinématographique intéressante, sans que cela soit son objectif premier : est-ce la mafia qui a influencé les films de gangsters ou les gangsters sont-ils influencés par les films de mafia ? Les éléments de comparaison ne manquent pas, à l’instar des costards du gang qui ressemblent à ceux des gangsters de Tarantino, ou l'anecdote de la tête de chien proche de celle de la tête de cheval du Parrain. Et outre cette réflexion sur les influences réciproques, les retournements de situation ne manquent pas, ce qui permet au spectateur de ne jamais se lasser du film.

Du journalisme, de l’anthropologie et du cinéma : que demandez de plus ?

Note : ****

vendredi 24 avril 2009

Sherlock Jr


C’est amusant de voir comment on a souvent comparer Charlie Chaplin et Buster Keaton alors que, fondamentalement, ils n’en ont en commun que le fait d’appartenir au burlesque.

Prenons ce Sherlock Jr par exemple, le film préféré de Keaton lui-même. Eh bien il s’agit ni plus ni moins que d’un des films les plus aboutis de Buster à tous points de vue.

D’une part, Buster Keaton ne s’embarrasse pas d’un récit qui détournerait le spectateur de ses cascades : le burlesque pour le burlesque. C’est ainsi que l’enquête policière est étouffée dans l’œuf, le spectateur sachant d’emblée qui est le voleur et l’héroïne aussi. Débarrassé de tout suspens inutile à ses yeux, Buster peut alors se concentrer sur l’aspect plus poétique de son film.

Il est bien difficile d’expliquer cette célèbre scène du rêve du projectionniste, où celui-ci tente désespérément d’entrer dans le film projeté. Des images valent mieux qu’un long discours :



Cette séquence (qui par ailleurs inspirera Woody Allen pour La rose pourpre du Caire, où cette fois un héros sort de l’écran plutôt que d’y rentrer) est symptomatique de la différence entre Chaplin, cinéaste humaniste, et Buster Keaton, cinéaste à visée artistique. Voici comment on peut interpréter cette séquence : il existe deux mondes (le réel et le rêve) qui cohabitent ensemble. Le cinéma est donc du rêve pour Keaton. Lorsque celui-ci s’assoit avec les autres spectateurs, il se met à leur niveau, et c’est quand il tente d’ « entrer » dans le film qu’il éprouve des difficultés, mais sa persévérance paie et le voilà alors totalement intégré au film. En quelques minutes, Buster Keaton vient de résumer l’essence même du cinéma et le statut du spectateur, tout en étant irrésistiblement drôle.

Après, Keaton ne perd jamais une occasion de démontrer son incroyable maîtrise corporelle et son goût du risque (cfr cette séquence où il pilote une moto en étant assis sur le guidon). Le récit étant sommairement résolu, l’artiste peut ainsi enchaîner les grands moments sans aucun complexe ou souci de cohérence narrative.

A noter enfin que, chez Chaplin, les relations amoureuses sont romantiques : soit elles finissent bien (Les lumières de la ville, Les temps modernes), soit elles finissent par la solitude de Charlot (Le cirque). Keaton, lui, ne voit dans les relations amoureuses qu’un ressort comique ou narratif (Le mécano de la General) plutôt que l’expression d’un sentiment. Il possède en outre un regard moderne sur les relations, à l’instar du final de Sherlock Jr où, imitant le film qu’il projette, le héros parvient à reconquérir sa fiancée – et se voit bien embarrassé ce qui l’attend du côté des enfants !

Extrêmement drôle mais aussi sacrément poétique, Sherlock Jr prouve qu’il est plus que temps de réhabiliter un cinéaste aussi doué que Chaplin au panthéon des génies du burlesque, pour ne pas dire du cinéma tout court.

Note : *****

mardi 21 avril 2009

Mensonges d'Etat (Body of lies)


L’Irak, c’est le nouveau Vietnam du cinéma hollywoodien : une source intarissable de sujets de scénario. On y trouve du bon et du moins bon, à l’image de Body of Lies.

Pour la énième fois donc, un agent de la CIA lutte contre le terrorisme en territoire hostile ; pour la énième fois, il est pris au milieu de magouilles et de danger permanent ; pour la énième fois, le message « la guerre c’est peut-être pas si bien que ça mais les Américains la font de toute façon bien » revient.

Rien de neuf sous le soleil du désert donc : un vilain terroriste est poursuivi par un preux agent de la CIA, aux bottes d’un grand (gros) manitou resté à l’abri à Washington. Le mélange « ambiance de Syrianna + effets satellites de Ennemi d’Etat » laisse rapidement dubitatif. Les Américains sont Dieu, ils voient tout depuis le ciel – tout sauf leurs ennemis. On se demande plus d’une fois si c’est bien Ridley Scott (dont American Gangster avait quand même été une belle réussite) qui est aux commandes, ou son frère chéri des studios. Le rythme est assez plat, les cadrages convenus, l’ambiance torride et angoissante absente.

Côté acteurs, Di Caprio semble s’enfermer dans un style de personnage au fil du temps : l’action man engagé et plutôt rebelle, comme il l’était déjà dans Blood Diamond. Vivement qu’il revienne chez Scorsese pour se ressaisir un peu. De son côté, Russel Crowe la joue fine, préférant se laisser aller dans l’embonpoint et au côté sournois de son personnage : un très bon moment.

Mais de bons acteurs ne font hélas pas un bon film. En l’occurrence, Body of lies est, sans être un film honteux, un pseudo pamphlet qui n’apporte rien de plus au genre. Et fait toujours douter d’un retour en grâce du réalisateur des Duellistes, Alien ou Blade Runner.

Note : **

samedi 18 avril 2009

Maradona by Kusturica


C’est amusant de penser que nombre de cinéastes très visuels (Scorsese) et doués pour raconter des histoires absurdes ou surréalistes (Jarmusch) aiment s’essayer au documentaire de temps en temps. Ici, c’est Kusturica qui décide de réunir ses deux passions, le cinéma et le football, en parlant d’ « El Pibe de Oro », le maître Maradona.

Ce n’est pas un coup d’essai : Kusturica s’était déjà essayé au documentaire avec Super 8 stories, où grâce à la musique il mélangeait la petite et la grande histoire, sur fond de No Smoking Orchestra, le sujet du film. J’étais relativement confiant donc, bien que ne connaissant pas grand chose au football, sur ce documentaire. Mal m’en a pris.

Je m'explique : au début Kusturica parle de Maradona. 5 minutes plus tard, Kusturica parle de Kusturica et de ses films. 10 minutes plus tard, il parle de Diego, son nouveau pote qu'il filme en voiture, à pied, au barbec chez les Kusturica, à la TV, en manif, au restaurant karaoké... C’est un peu comme les Martine en fait, en moins éducatif.

Et à part ça, rien. Maradona parle : son talent immense, ses problèmes de drogues, ses problèmes avec la mafia qui lui a plombé sa carrière… Rien de neuf. Le personnage se suffit à lui-même, sa mégalomanie et son égocentrisme lui permettant de parler sans cesse et sans détour, pour montrer qu’il a changé. Aussi, quand Kusturica voit que son sujet est limité, il extrapole, voit dans le but de la main de Maradona contre l'Angleterre en 86 une vengeance des Malouines, et l'occasion pour le cinéaste d'imposer ses idées socialistes via 1/ une critique du vilain pas beau impérialisme, 2/ un hommage à l'Amérique Latine révolutionnaire de Che Guevara et 3/ des animations (très moches) où Maradona drible (et corrige copieusement) Tatcher, la famille royale et des présidents des USA. On se croirait presque chez Michael Moore !

Et quand il se rend compte que tout ça n'est toujours pas suffisant, Kusturica s'attarde sur une "Eglise du Dieu Maradona", que j'appellerais perso une secte pour perturbés mentaux (à noter la scène extraordinaire de mariage !) ainsi que leur lieu de pèlerinage (ou quelque chose du genre), autrement dit un bordel (au moins pour une fois dans le documentaire quelque chose de beau à regarder quand les demoiselles argentines se trémoussent).

Et tout ça sous une caméra numérique à l’image dégueu, et un surdécoupage inutile et plombant le processus de documentaire (on voit les 3 équipes qui filment dans différents plans) sans le remettre en cause. Juste une occasion pour Kusturica de se montrer à l’image autant que l’idole du football.

Le fil rouge du film reste bien évidemment les buts tous plus remarquables les uns que les autres de Maradona, dont le fameux « goal du siècle » repassé à profusion.



Au final, je n’ai rien appris, beaucoup d'ennui même si j’ai ri (aux dépens du film ?) et surtout j’ai eu la sale impression qu'on essayait de m'imposer des idées. Kusturica semble avoir abandonné la subtilité pour les gros crampons. Ce n’est pas une bonne nouvelle…

Note : *

mercredi 15 avril 2009

Woody et les robots (Sleeper)


Synopsis : En 2173, un homme congelé est ramené à la vie par des chirurgiens révolutionnaires. Arrêté, il se débat dans une société gadgétisée dont la vie est réglée par des robots…

Le petit plus : La voix de l'ordinateur est celle de Douglas Rain, qui parodie ainsi un de ses propres rôles : celui - vocal - de l'ordinateur HAL 9000 de 2001 : l'odyssée de l'espace.

Avis :
+ Plusieurs éléments du futur univers de Woody (la métaphysique, le sexe…)
+ Beaucoup d’humour
- Une parodie un peu facile pour ne pas dire lourdingue
- Trop d’enfilade de sketchs et peu de récit continu
- Ne tient pas la comparaison avec Bananas ou surtout Guerre et Amour

Note : **

jeudi 9 avril 2009

Tenue de soirée


Chapitre 1 : « Annonce-moi des bonnes nouvelles au lieu tout le temps de me parler de ton amour ! »

C’est l’histoire de Monique et Antoine. Antoine est fou amoureux de Monique, Monique en a marre de leur vie de merde. Arrive alors le grand Bob, un chêne, qui propose de leur changer la vie – et c’est ce qu’il va faire.

Chapitre 2 : « Une serrure, il faut que ça mouille, c'est comme tous les orifices ! Tu la démarres à la salive et t'attends qu'elle se donne. »

Le changement, il débute avec les cambriolages nocturnes des riches. Ses séquences sont assez symptomatiques du style Blier je trouve : une esthétique souvent ancrée dans son époque. Ici donc les années 80. Ces séquences de nuit m’ont un peu rappelé celles de Buffet froid, soit des rues vides et une lumière particulière. C’est un reproche que l’on pourrait faire mais moi personnellement j’aime.

Chapitre 3 : « J'vais tout de même pas me faire enculer sous prétexte que c'est un ami ! »

Seulement voilà, le Bob il n’a qu’une idée : transformer le trou du cul d’Antoine en entrée de métro ! Le sexe, obsession de Blier, revient ici sous une forme qu’il avait à peine esquissé auparavant : l’homosexualité. Mais Blier a la décence de ne pas faire de jugement, ou de tomber dans le stéréotype. C’est aussi, en fin de compte, l’un des thèmes du film : le besoin de posséder. Antoine veut posséder Monique, elle veut posséder Bob, Bob veut posséder Antoine ; sur le côté Monique veut posséder plus de richesses, alors que Bob veut posséder autant d’hommes que possible. Et en fait, quand on a, on en veut plus.

Chapitre 4 : « Le mec qui est dans ton lit, il vient de se faire enculer, ma p'tite fille. Voilà. Après ça, on dira que la vie est belle. »

C’est ce qui rend le film de Blier assez acide : le constat sur le couple est très très dur. Qu’on soit hétéro ou homo, le résultat sera le même : la déception. Ce qui fait de Tenue de soirée, derrière ses allures de comédie insolente (on compte 2 répliques cultes à la minute), l’un des films les plus pessimistes de Blier pour moi. Non pas que je considère le monsieur comme un profond optimiste, mais quand même.

Chapitre 5 : « Pour faire sa vie, il faut avoir la vocation de vivre. Moi ma vocation, c'est de crever. »

Ce constat, il est porté à merveille par le trio principal : Miou-Miou, beaucoup Gérard Depardieu et surtout Michel Blanc, incroyable, à la fois pathétique et touchant, à vif et en retenue. Un contraste, un vrai, comme son personnage. Un changement de cap dans la carrière de l’acteur, qui fait parfois plus pitié que rire. Un vrai grand moment d’interprétation.

Epilogue

Clairement inscrit dans la filmographie de Blier, tant d’un point de vue esthétique que thématique (le(s) couple(s) en crise), le film est une farce tragicomique sur l’être humain. On rit beaucoup, on le termine avec une pointe d’amertume. C’est aussi ça, le style Blier. Putain de film !

Note : ****

lundi 6 avril 2009

New York 1997 (Escape from New York)


Appelez-le… Snake.

L’enfoiré de service. Le bad guy. L’antihéros à la fuck attitude. Un des premiers du genre. LE rôle de Kurt Russell. A ses côtés, du lourd pour bien montrer son importance : Ernest Borgnine, Lee Van Cleef, Donald Pleasance, Harry Dean Stanton, Isaac Hayes… Vous connaissez d’autres gueules de cinéma qui conviennent mieux vous ? Et visiblement Kurt Russell a plu aussi à John Carpenter, puisqu’il le réengagera dans ses films suivants (The Thing, Big trouble in Little China ou encore Los Angeles 2013).

Ce qui est intéressant, c’est qu’on ne sait rien de Snake Plissken : pourquoi est-il borgne, pourquoi a-t-il été arrêté, quel est son passé ? Il est juste connu de réputation. On est pas loin des personnages de Sergio Leone, auquel Lee Van Cleef est un clin d’œil puisqu’il joue ici aussi un chef de police (militaire dans Le bon, la brute et le truand). Cela n’a rien de vraiment étonnant lorsqu’on connaît la passion de Carpenter pour le western (cfr Assaut qui est quasi un remake de Rio Bravo) encore visible ici : une ville en proie au crime, un faux justicier qui se balade l’arme à la jambe, un meneur d’hommes qui fait la loi, des Indiens qui attaquent… Du western mais aussi du film noir et du film fantastique pur, de par les ambiances, la photographie et la musique.

Musique signée par ailleurs John Carpenter himself. L’artiste complet, qui s’occupe de tous les postes et gère cette production assez minime de 7 millions de dollars pour en faire un film qui semble en avoir coûté 10 fois plus. Les effets spéciaux sont parfaits (faut dire qu’un certain James Cameron y a travaillé), le tout est soigné et parfaitement calibré grand public sans renier une part de cinéma d’auteur (la patte Carpenter est reconnaissable en 3 images presque).

Un film culte, mais aussi un grand film. Un Carpenter quoi, cinéaste trop sous-estimé aujourd’hui.

Appelez-le… John.

Note : ****

vendredi 3 avril 2009

Stranger than Paradise


Stranger than Paradise est le second film de Jim Jarmusch, après son film de fin d’études Permanent Vacation.





Déjà dans ce film, Jarmusch démontre son originalité, à la fois le plus européen et le plus oriental des cinéastes américains. Comprenez par-là que ses films sont aussi dignes de la Nouvelle Vague que des films de son mentor Wim Wenders, avec une façon de raconter les choses lentement, à la manière de Yasujiro Ozu (dont un clin d’œil est glissé dont le nom d’un cheval de course, Tokyo Story).





La réalisation est assez simple en apparence : des plans-séquences, la plupart du temps fixes. Simple en apparence donc, car ces plans-séquences demandent donc un véritable travail de mise en scène, tant dans la direction d’acteurs que dans la composition du cadre.





Comme il le démontrera plus tard encore, Jim Jarmusch est un as en matière de noir et blanc : ici très contrasté, il n’en est pas moins superbe et mets autant en valeur les décors pauvres que les personnages atypiques. A noter aussi cette utilisation récurrente de l’écran noir pour séparer les parties du récit, comme si le film était un enchaînement de sketchs presque indépendants les uns des autres.





Tour à tour drôle et amer, décalé à l’image de la musique de Screamin Jay Hawkins, le film est le récit d’occasions manquées, de loosers qui ne font rien, traînant derrière eux leur ennui (que ce soit New York, Cleveland ou la Floride, tout se ressemble, tout est froid et ennuyeux), et un regard ironique sur l’Amérique : le football, les plateaux télés que l’on mange sans regarder la télé… Tout ici est farfelu, ridicule, absurde. Et le final, surprenant.





Un second film qui annonçait déjà un cinéaste unique, culte, intemporel. Depuis, il s’est largement confirmé, le Jim.

Note : ****